Le spectacle suit la chronologie des évènements du 2 au 31 Mai 68,au jour le jour inscrit sur grand écran tricolore théâtralement encadré de rideaux transparents,et donne lieu à différents tableaux d'entretiens du Chef de l'Etat avec trois de ses ministres :
Pompidou (incarné par Laurent Montel), Fouchet (Luc Tremblais), Messmer (Dominique Compagnon) et son conseiller Jacques Foccar t(Arnaud Décarsin). Nous y retrouvons la plupart des phrases célèbres prononcées par le Général au cours des réunions au Palais de l'Elysée ou dans ses allocutions télévisées: "Pas de raison de s'inquiéter,c'est un monôme!", puis quand la situation s'aggrave et qu'un référendum est envisagé: "Il faut donner l'impression de vouloir dialoguer...développer la participation...", avec des formules animées par le courage, qui font mouche et qui frapperont tous les esprits: "L'intimidation,l'intoxication et la tyrannie se retrouvent organisées par des groupes totalitaires", ou bien: '"La France est menacée de dictature. On veut la contraindre à un pouvoir qui s'imposerait dans le désespoir national."
Sont évoqués également la plupart des faits de ces mois d'émeutes: occupation de la Sorbonne, de l'Odéon, des usines, grève générale, paralysie totale du pays, sans qu'aucune photo, aucun film n'occupent l'écran, avec seulement le bruitage radio des manifestations. Mais comme,par ailleurs, les cinq acteurs ne ressemblent pas aux intéressés et que l'excessive théâtralité crée un effet d'étrangeté, nous sommes confrontés à une dramaturgie du Vrai-Faux qui nous fait assister, dans une atmosphère satirique, au style de crise que traverse tout pouvoir politique devant un soulèvement populaire de grande ampleur.
Pour accentuer au maximum les effets comiques de la situation, la mise en scène de Jean-Louis Benoit intègre le plus souvent aux comportements protocolaires des attitudes bouffonnes qui transforment le chef de l'Etat et ses ministres en pantins ridicules: ainsi De Gaulle (Jean-Marie Frin) peut aussi bien saluer le public avec déférence, méditer sur un pavé, enfermé dans un placard, se coucher sur le plateau, ou danser sur la chanson d'Yves Montand ("à bicyclette"), dans une chorégraphie de Lionel Hoche, de la manière la plus burlesque ; ses ministres peuvent courir en tous sens, ou trembler devant les remontrances du Maître, tous se présentent en définitive comme les acteurs d'une guignolade qui par moments angoisse plus qu'elle ne rassure.
La scénographie d'Alain Chambon se situe dans ces proportions. Avec ses armoires ministérielles qui abritent des cravates, des pyjamas, des pardessus, un téléphone, et par lesquelles entrent et sortent les personnages, témoins cachés de toutes les conversations secrètes, elles participent symboliquement, dans une disposition d'ordre et de désordre, du climat machiavélique qui finira par l'emporter.
Etonnant spectacle donc, à la fois sérieux et drôle, invitant à réfléchir et à débattre sur le pouvoir gaulliste, ses stratégies, ses contradictions, ses conflits internes,et qui rend paradoxalement la figure héroïque de De Gaulle encore plus fascinante.
Philippe Oualid.
Pompidou (incarné par Laurent Montel), Fouchet (Luc Tremblais), Messmer (Dominique Compagnon) et son conseiller Jacques Foccar t(Arnaud Décarsin). Nous y retrouvons la plupart des phrases célèbres prononcées par le Général au cours des réunions au Palais de l'Elysée ou dans ses allocutions télévisées: "Pas de raison de s'inquiéter,c'est un monôme!", puis quand la situation s'aggrave et qu'un référendum est envisagé: "Il faut donner l'impression de vouloir dialoguer...développer la participation...", avec des formules animées par le courage, qui font mouche et qui frapperont tous les esprits: "L'intimidation,l'intoxication et la tyrannie se retrouvent organisées par des groupes totalitaires", ou bien: '"La France est menacée de dictature. On veut la contraindre à un pouvoir qui s'imposerait dans le désespoir national."
Sont évoqués également la plupart des faits de ces mois d'émeutes: occupation de la Sorbonne, de l'Odéon, des usines, grève générale, paralysie totale du pays, sans qu'aucune photo, aucun film n'occupent l'écran, avec seulement le bruitage radio des manifestations. Mais comme,par ailleurs, les cinq acteurs ne ressemblent pas aux intéressés et que l'excessive théâtralité crée un effet d'étrangeté, nous sommes confrontés à une dramaturgie du Vrai-Faux qui nous fait assister, dans une atmosphère satirique, au style de crise que traverse tout pouvoir politique devant un soulèvement populaire de grande ampleur.
Pour accentuer au maximum les effets comiques de la situation, la mise en scène de Jean-Louis Benoit intègre le plus souvent aux comportements protocolaires des attitudes bouffonnes qui transforment le chef de l'Etat et ses ministres en pantins ridicules: ainsi De Gaulle (Jean-Marie Frin) peut aussi bien saluer le public avec déférence, méditer sur un pavé, enfermé dans un placard, se coucher sur le plateau, ou danser sur la chanson d'Yves Montand ("à bicyclette"), dans une chorégraphie de Lionel Hoche, de la manière la plus burlesque ; ses ministres peuvent courir en tous sens, ou trembler devant les remontrances du Maître, tous se présentent en définitive comme les acteurs d'une guignolade qui par moments angoisse plus qu'elle ne rassure.
La scénographie d'Alain Chambon se situe dans ces proportions. Avec ses armoires ministérielles qui abritent des cravates, des pyjamas, des pardessus, un téléphone, et par lesquelles entrent et sortent les personnages, témoins cachés de toutes les conversations secrètes, elles participent symboliquement, dans une disposition d'ordre et de désordre, du climat machiavélique qui finira par l'emporter.
Etonnant spectacle donc, à la fois sérieux et drôle, invitant à réfléchir et à débattre sur le pouvoir gaulliste, ses stratégies, ses contradictions, ses conflits internes,et qui rend paradoxalement la figure héroïque de De Gaulle encore plus fascinante.
Philippe Oualid.