Abbaye de Sylvanès, l'actualité du Centre culturel de rencontre : coup d'œil sur l'été 2022

A Sylvanès, l’automne est bientôt là mais le merveilleux été musical qui s’est clôturé en beauté le 28 août dernier est encore bien présent dans les têtes et les cœurs…


Malgré la chaleur éprouvante des deux mois d’été et le rythme intense, nous avons vécu sept semaines de Festival riches en découvertes et en émotions !

Fidèle à sa vocation, le Festival a rendu hommage aux monuments de la musique sacrée avec des programmes très attractifs, d'autres plus audacieux, mais aussi des concerts originaux aux confins des musiques du monde.
La création contemporaine avait aussi une place de choix et a offert de grands moments de découverte avec pas moins de quatre créations mondiales.
Le Festival de Sylvanès, c’est aussi le rendez-vous de l’amitié : les chefs de chœur et d’orchestre Michel Piquemal, Bernard Tétu et Jean-Michel Hasler ont honoré cette 45e édition de leur présence avec de superbes concerts. Notre Festival s'ancre également dans une mission d’insertion professionnelle de jeunes chanteurs et musiciens. Ils furent nombreux cet été à nous régaler !

L'été à Sylvanès, ce fut bien sûr le Festival mais toute l'activité en parallèle ( stages de formation vocale, résidences d'artistes, visites et médiation…) n'était pas en reste !

Je vous laisse découvrir ci-dessous les témoignages des artistes résidents étrangers que nous avons eu le plaisir d'accueillir pendant l'été ainsi que la très prochaine actualité de notre Centre culturel : journées du Patrimoine ce week-end, concert de la Maîtrise de l'IRVEM, la reprise des projets d'EAC, stages et masterclass à venir !

A très bientôt la joie de vous revoir !

Michel Wolkowitsky
Directeur de l'abbaye

Deux masterclass à l'automne 

Michel Wolkowitsky & Béatrice Uria Monzon
Réservées aux niveaux supérieur et professionnel, les classes de maître de chant lyrique programmées fin octobre se concentreront majoritairement sur la technique vocale et l’interprétation. Le pédagogue et chanteur Michel Wolkowitsky (du 25 au 30 octobre) ouvrira la voie à la soliste lyrique Béatrice Uria Monzon (du 31 octobre au 6 novembre) qui fera profiter aux jeunes talents de ses années d’expérience et conseils avisés. Il est encore temps de s’inscrire (prise en charge possible au titre de la formation professionnelle).

Des résidents charmés par Sylvanès !

Au cours de l’été, le Centre culturel de rencontre a intensifié son programme d’accueil en résidence, et notamment en lien avec les programmes Odyssée et Nafas de l’ACCR. Ils étaient quatre artistes étrangers à séjourner successivement à Sylvanès au cours de la saison estivale : le photographe indien Pulak Halder et le musicien Dhrupad Sajan Sankaran ainsi que les artistes libanais Francis Eliya (chanteur) et Elie Choufani (comédien). Tous ont apprécié l’environnement naturel, les conditions d’accueil mais surtout la qualité et la richesse des échanges, du travail mutuel et des belles rencontres faites dans nos murs !

Le photographe Pulak Halder accueilli en résidence

Pulak Halder © DR
C’est avec grand plaisir que nous avons accueilli, du 24 au 29 juin, le photographe indien Pulak Halder dans le cadre d’une résidence artistique organisée en collaboration avec l’Association des Centres Culturels de Rencontre. Sa présence à l’abbaye de Sylvanès constitue la dernière étape (après La Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon et de l’Abbaye Royale de Fontevraud) d’un voyage long d’un mois en France !
Au cours de son séjour, Pulak Halder aura pu travailler plus en profondeur sur son projet intitulé « Painting with Camera » [Peindre avec un appareil photo]. Intimement convaincu que « rien n’est terne ou insignifiant pour nous si nous l’examinons dans toute sa complexité », l’artiste travaille autour de différentes techniques de macrophotographie pour faire surgir, au creux des vues les plus banales, des scènes dignes des plus grandes peintures impressionnistes.
Stéphanie Pezé

Sajan Sankaran, entre pratique et partage !

Sajan Sankaran © DR
Après plusieurs reports de sa résidence à l’abbaye de Sylvanès (depuis 2020), l’artiste indien Sajan Sankaran a enfin pu se poser en terre aveyronnaise, du 25 juillet au 6 août 2022 dans le cadre du dispositif « Odyssée » initié par l’ACCR.
Il s’agissait pour Sajan de sa première résidence en Europe avec pour objectif d’aller à la rencontre des personnes et d’explorer plusieurs milieux artistiques. Des souhaits qui ont été très largement concrétisés lors de sa résidence artistique à l’abbaye placée sous le signe du partage et des échanges.

Des échanges passionnants et fructueux
Lors de son séjour, l’activité artistique des stages et du 45e Festival était à son apogée à Sylvanès. Pas moins de quatre stages et masterclasses se déroulaient dans les murs du Centre culturel de rencontre ainsi que des concerts du festival de musiques sacrées-musiques du Monde.

La première semaine de sa résidence, la classe de maître encadrée par Élène Golgevit & Charlotte Bonneu cohabitait avec un atelier de chant sacrés d’orient et d’occident animé par Frédéric Tavernier-Vellas.
i[« L’énergie des chanteurs professionnels participant à la classe de maître de chant lyrique était très inspirante et m’a rappelé l’énergie de mon propre Gurukul [1] où tous les enseignants sont eux-mêmes des musiciens professionnels et délivrent une formation individuelle intense pour chaque élève.
J’ai aussi apprécié d’expérimenter des chants sacrés européens : j’ai retrouvé de nombreuses similitudes dans l’approche de la voix avec la musique indienne.
Dans tous les cas, j’ai apprécié l’intérêt des enseignants et des participants pour la musique indienne et les nombreuses discussions sur la musique en général, la création musicale, l’approche et la philosophie de la voix ».]i


[1] Un gurukul est une école traditionnelle en Inde où les élèves (shishya) vivent près de leur gourou (enseignant), souvent dans le même logement, comme une sorte de famille.

Carnet de résidence d’Eliya Francis

Eliya devant l’abbatiale de Sylvanès © DR
Nous avons eu l’immense plaisir d’accueillir l’artiste libanais Eliya Francis à l’Abbaye de Sylvanès du 5 au 25 juillet 2022 dans le cadre d’une résidence artistique organisée dans le cadre du programme NAFAS mis en place par l’Association des Centres culturels de rencontre.

L’objectif de ce programme NAFAS est de répondre à la crise qui frappe la scène culturelle libanaise et de permettre à des artistes libanais de résider dans un Centre culturel de rencontre afin d’expérimenter, créer et enrichir leur pratique.

Eliya Francis est un ténor libanais. Il a étudié la musicologie et le chant d’opéra classique à l’Université Saint-Esprit de Kaslik et a participé à plusieurs masterclasses internationales en France, en Italie, en Russie et en Allemagne. En 2012, il a remporté le prix Murex D’or du meilleur chanteur d’opéra du Moyen-Orient.

Eliya a beaucoup apprécié son séjour parmi nous et a eu la gentillesse de rédiger quelques lignes sur son ressenti et son vécu de résidence. Nous avons l’immense plaisir de partager ci-dessous son chaleureux témoignage :
« J’écris cette lettre assis sur la rive de la timide rivière qui s’assèche presque et les brises du vent d’été soufflent de temps en temps. J’écris sur la fin de ma résidence à l’Abbaye de Sylvanès.
Que puis-je dire de cet endroit merveilleux ? Comment décrire la beauté et le charme de cette abbaye entourée d’arbres, d’eau, d’oiseaux, d’air frais et surtout de belles personnes.
Ici, on oublie les soucis de la vie, nous revenons aux racines où ni la télévision ni les réseaux sociaux ne nous détournent de la beauté de la nature.

Cette Abbaye, labellisée Centre culturel de rencontre reçoit des artistes du monde entier et les rassemble au nom de l’art, de la culture et de l’échange d’expériences. À chaque fois que je rencontre quelqu’un, il me dit que ce n’est pas la première fois qu’il participe à des stages dans ce lieu. Bien sûr, je connais très bien la raison de tous ceux qui viennent ici plus d’une fois, c’est Sylvanès le village charmant qui nous fascine sans qu’on s’en rende compte, alors on ressent le besoin de revenir une deuxième, une troisième… puis une dixième fois.

Je viens du Liban, le pays de la paix, de l’amour et de la beauté, du « SETTEDDONIA » la dame du monde BEIRUT, qui par jalousie de sa beauté, voulait qu’elle soit détruite. Ce fut la troisième plus grande explosion au monde qui a secoué toute l’humanité. Mais ils ont oublié que le Liban et les libanais sont du pays du phénix, qui se consume et renait de ses cendres. Alors je suis venu ici pour retrouver ma vie musicale.

L’atmosphère que procure cette abbaye convient très bien à quiconque veut se concentrer pour créer et produire de l’art. J’ai commencé à travailler sur un projet de fusionnement de la musique arabe orientale et occidentale, je me voyais participer à la masterclass de chant lyrique dirigées par Frédéric Gindraux, comme au stage « Chanter en Famille » dirigé par Béatrice Gaussorgues. Et avec mon grand amour pour ces familles qui viennent de toute la France louer Dieu avec leurs voix merveilleuses, j’ai eu l’occasion de leur apprendre un hymne en langue libanaise, et la grande surprise qu’ils l’ont chantée dans la messe du dimanche.

Aussi j’ai eu la chance de faire connaissance avec Bernard Tétu, chef de chœur modeste, très bon et au sourire affectueux. J’ai partagé beaucoup de discussions avec lui et les membres de l’Atelier-Choral qu’il encadrait durant une semaine à Sylvanès. J’ai senti leur intérêt et la conscience de tout ce qui se passe au Liban, et à quel point ils sont solidaires avec les libanais.

À tout le personnel de l’Abbaye de Sylvanès, administrateurs, cuisiniers, agents d’entretien, techniciens et stagiaires, je vous remercie du fond du cœur pour votre travail, votre passion et votre esprit de famille, qui se reflètent sur nous. Alors on se sent chez soi.

Enfin, je fais comme aux noces de Cana de Galilée, je laisse le bon vin pour la fin, pour parler d’un leader, pédagogue, père, frère, ami… L’évocation de toutes ces qualités ne me suffit pas pour remercier Michel WOLKOWITSKY, pour son attention et sa présence dans les moindres détails lors de ma résidence à l’Abbaye ».

Elie Choufani, comédien libanais en résidence

Elie Choufani est un acteur libanais qui a travaillé sur plusieurs séries télévisées, pièces de théâtre, films et courts métrages primés. Elie a suivi sa formation d’acteur à l’Actors Workshop Beirut (AWB) sous la direction de Jacques Maroun et a participé à plusieurs ateliers de théâtre, à Beyrouth et à Los Angeles, notamment avec la metteure en scène et voix primée Susan Worsfold et le réalisateur et professeur de théâtre David Strasberg.
Il a été accueilli à l’Abbaye de Sylvanès du 15 au 22 août dans le cadre d’une résidence artistique au travers du programme NAFAS coordonné par l’ACCR ( mis en place afin de répondre à la crise culturelle qui frappe le Liban).

Entrevue
Qu’est-ce qui vous a amené à Sylvanès ?
Lorsque j’ai postulé au programme NAFAS de l’ACCR en 2021, c’était presque un coup d’épée dans l’eau ; je n’avais aucune attente quant à l’expérience, les centres d’accueil ou si je serais accepté…. Tout ce que je savais, c’est que je voulais apprendre et travailler ma voix.

Avec un objectif bien précis donc ?
En effet, lors de mon parcours de formation d’acteur, j’ai été amené à découvrir des écoles de travail de la voix (notamment auprès de Tarek Annish puis de Nadine George).
Ces ateliers m’ont appris que la source de la voix est le corps entier et pas seulement les cordes vocales, la gorge ou la poitrine ; La voix est une énergie reliée à la respiration. J’ai appris à libérer mon souffle et ma voix et cela m’a été très utile dans ma carrière d’acteur, car cette nouvelle voix libre m’a aidé à atteindre des nuances émotionnelles intéressantes et uniques.
L’objectif de cette résidence à l’Abbaye de Sylvanès était donc d’approfondir ces recherches sur la voix et de développer une méthodologie utile à la préparation et à la performance de l’acteur.

Quel était votre le programme vocal à l’abbaye?
Michel Wolkowitski, le directeur du centre culturel et du festival, également pédagogue de la voix a dirigé ma formation tout au long de mon séjour et a été un hôte formidable.
J’ai travaillé avec Michel quotidiennement, en me concentrant le déroulé d’une séquence complète à effectuer avant tout entraînement ou représentation vocale ou théâtrale. Michel m’a expliqué les bases de la technique Alexander (étirements, respiration et compréhension des cinq « charnières » du corps) puis des techniques d’échauffement respiratoire. Ce que j’ai appris, c’est que l’état de relaxation atteint après l’échauffement et la respiration doit être associé à une posture forte et « soutenue » afin de libérer la voix.

Cette séance était généralement suivie d’un travail vocal guidé au piano et d’une pratique du chant ou du monologue. Le travail sur le ton de la voix m’a également fasciné.

De nouvelles notions qui ont mûri au cours de votre résidence ?
Oui, tout à fait. J’ai senti que je progressais dans ce domaine de la voix. J’ai par exemple appris de mon travail sur le ton de la voix qu’il y a quelque chose de très intéressant pour un acteur d’atteindre les tons précis du chant ; cela crée en quelque sorte un sentiment de fraîcheur et de légèreté. J’ai également été étonné de voir l’effet de ce travail vocal sur mon articulation qui ne me satisfaisait pas toujours. Après ces exercices, mon articulation semblait être plus claire et plus vivante.

Avez-vous pu également profiter des concerts du festival ?
Oui, j’ai eu la chance d’assister à plusieurs concerts dans le cadre du 45e Festival de l’Abbaye de Sylvanès. J’ai été témoin de la beauté et de la puissance de la voix de différents styles musicaux. En assistant aux concerts et en écoutant les voix des chanteurs, du chœur, le son des instruments et en regardant les visages des spectateurs, j’ai réalisé que la beauté de la voix humaine est capable de créer une sensibilité chez son public. Et pendant toute la durée de la résidence, le mot qui n’a pas quitté ma tête était « sensibilité ».

Une « sensibilité » qui vous a touché ?
En effet, à Sylvanès, elle est présente partout : j’ai commencé à la remarquer dans la voix des artistes, dans leurs expressions faciales, dans le comportement des personnes, dans la nature environnante, dans les murs et les pièces de l’Abbaye.
Et je me suis dit que c’était ce dont mon pays avait besoin, plus de sensibilité. Avec tous les problèmes politiques et économiques auxquels le Liban est actuellement confronté, je m’inquiète personnellement de la perte de l’esprit sensible des Libanais. Je pense que plus le pays est confronté à des difficultés, moins les gens ont envie d’assister à des concerts, à des pièces de théâtre … et moins ils sont sensibles.

Un dernier mot sur votre séjour à Sylvanès ?
Le séjour à Sylvanès a été en soi une expérience inspirante. L’architecture de l’abbaye, et la beauté de la nature environnante ont un effet calmant et relaxant qui aide l’artiste à mieux se ressourcer intérieurement.
Les personnes fréquentant Sylvanès, y compris l’équipe, les professeurs, les artistes, les invités et les étudiants ont été très accueillants et d’un grand soutien. Michel Wolkowitski a partagé avec moi de nombreuses informations sur son parcours de vie avec la voix et le théâtre, l’histoire de l’Abbaye et son festival et a eu la gentillesse de me montrer un aperçu de quelques autres sites patrimoniaux de l’Aveyron.
Personnellement, je lui suis très reconnaissant pour cette magnifique expérience et garde en mémoire ses précieux conseils : pour rester sensible, toujours écouter et chercher l’énergie de la voix de l’intérieur.

Pierre Aimar
Mis en ligne le Jeudi 15 Septembre 2022 à 21:12 | Lu 306 fois
Pierre Aimar
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