Estelle Revaz, un violoncelle au cœur de la connivence

La violoncelliste Estelle Revaz ouvre la nouvelle année sur trois voyages, qui reflètent trois visages de son instrument : l’un en Chine, où elle s’associe pour plusieurs concerts de musique de chambre à des musiciens suisses et chinois ; l’autre dans l’univers singulier du compositeur Frank Martin, dont elle joue la Ballade dans le cadre de sa résidence à L’Orchestre de Chambre de Genève ; le troisième aux origines populaires qui innervent le répertoire classique, avec un programme éminemment poétique défendu depuis plusieurs mois déjà avec la pianiste Anaïs Crestin.


Estelle Revaz © DR

Schubert en Chine

C'est à l’occasion de la célébration du jubilé des relations sino-suisses qu’Estelle Revaz s’envole pour plusieurs concerts en Chine le 13 janvier. Dans l’esprit du dialogue qui rapproche les deux pays depuis 1950, renforcé, dans le domaine culturel, par la signature en janvier 2017 d’un accord bilatéral, trois musiciens suisses – Jürg Dähler (alto), Estelle Revaz (violoncelle) et Richard Dubugnon (contrebasse) – et deux musiciens chinois – Mélodie Zhao (piano), Liú Yunzhi (violon) – associent leur talent dans un programme agencé autour du Quintette « La Truite » de Schubert et d'une création de Richard Dubugnon.
« C’est la troisième fois que je vais en Chine, précise la violoncelliste. Je suis heureuse d’y retrouver des amis et de partager de nouvelles aventures musicales. »

Apogée de la résidence à l’Orchestre de Chambre de Genève

Estelle Revaz voit néanmoins déjà plus loin, tendue vers le rendez-vous du 25 janvier au Studio Ernest-Ansermet, à Genève : la Ballade pour violoncelle et orchestre de Frank Martin (1890-1974), dont elle sera la soliste sous la direction d’Arie Van Beek, marquera un point important de sa résidence triennale à L’Orchestre de Chambre de Genève. Le compositeur suisse, reconnu de son vivant, est aujourd’hui peu représenté sur scène ; la violoncelliste s’est immergée dans son univers et dans la vie musicale genevoise pour s’imprégner totalement de son œuvre et lui redonner l’éclat qu’elle mérite.

« Frank Martin est un autodidacte qui s’est formé au contact des musiques qu’il entendait – Bach, Schumann, César Frank mais aussi le chant grégorien, le flamenco, explique-t-elle avec passion. Il a osé composer pour des formations parfois atypiques, pour des instruments étrangers à l’orchestre. Sa musique est très profonde et en même temps lumineuse. »

La jeune femme est séduite par cette écriture extrêmement exigeante techniquement, à la fois lyrique et héroïque, porteuse d’une certaine tension harmonique et d’une vraie modernité, tout comme par l’effervescence de son époque, qui voit notamment la création de l’Orchestre de la Suisse Romande. Un enregistrement viendra pérenniser en juin ce travail de longue haleine mené autour du compositeur avec l’orchestre genevois.

Une relation de confiance avec l'orchestre

Estelle Revaz donnera également avec L’OCG l’intégrale des concertos de Carl Philipp Emanuel Bach, le 16 février, au Temple de Lutry (Lausanne).

« C’est une expérience formidable, s’enthousiasme la violoncelliste. Je joue tout en dirigeant de mon instrument les trois concertos en un seul concert. J’aime transmettre cette énergie, avoir cette connivence avec les musiciens de l’orchestre que nous avons développée en trois ans au fil d’un répertoire très varié. Nous partageons une grande confiance les uns envers les autres. »

Inspiration Populaire, un programme arrivé à maturation

La confiance est également le ciment de son duo avec la pianiste Anaïs Crestin, avec qui elle mûrit le programme Inspiration populaire depuis plusieurs mois sur scène. Autour de la Sonate de Ginastera s’articulent les Canciones de de Falla, Pohádka de Janáček, les Stücke im Volkston de Schumann et la Rhapsodie hongroise de Popper. De ces écritures très différentes, de ces œuvres tendues entre tradition et modernité, toutes inspirées par le répertoire folklorique de leur pays, les deux interprètes expriment un esprit, une dynamique commune, où le son et le rythme sont très importants.

« Nous parvenons aujourd’hui à faire dialoguer les œuvres entre elles, confie-t-elle. Elles s’éclairent différemment, s’influencent les unes les autres. C’est un vrai cheminement. »

De la Belgique à la Suisse en passant par la France, le duo sera le 5 mars à Bruxelles, le 6 à Paris, le 8 à Gap, le 10 au château Les Moulinets, le 14 à Jussy et le 15 à Martigny.

Pierre Aimar
Mis en ligne le Mardi 14 Janvier 2020 à 03:31 | Lu 299 fois
Pierre Aimar
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