Exposition Fragonard, «Un Provençal aux Pays-Bas», Villa-musée Fragonard à Grasse, du 1er juillet au 30 septembre 2016

Grasse et Fragonard, l’association semble évidente et pourtant la réalité est plus complexe.


© DR Photographie Alexander Bassano 1913
Certes Jean-Honoré Fragonard naît à Grasse en 1732 dans une famille modeste d’ouvriers gantiers, cet artisanat grassois qui, depuis le XVIIe siècle, accompagne et est aussi pour partie à l’origine du développement de l’activité liée au parfum dans la ville.
Mais dès ses six ans, en 1738, toute la famille quitte la ville pour s’installer à Paris. Par la suite nous n’avons ni témoignages ni documents écrits qui pourraient faire supposer un retour ou un séjour du peintre dans sa ville natale. Cela jusqu’en février 1790, où Alexandre Maubert, son cousin, consigne, avec précision dans son livre de compte, un loyer mensuel que Fragonard lui verse pour loger avec sa femme et sa belle-sœur, Marguerite Gérard, dans sa bastide à un jet de pierre de l’entrée de Grasse. L’année suivante les Fragonard retournent à Paris, leur présence est confirmée dans la capitale en août 1793 par un document bancaire. Rien n’établit ensuite que le peintre revienne à Grasse.

Il meurt le 22 août 1806 après une promenade sur le Champs de Mars à Paris. Six ans puis une grosse année : certes deux périodes cruciales dans la vie du peintre, mais c’est au final assez peu. Ajoutons à cela la théorie, paradoxalement uniquement défendue localement, avec aplomb, depuis les années 1980, que les travaux de décoration de la cage d’escalier de la Villa Maubert n’étaient pas de la main de Jean-Honoré mais de son fils, le musée Fragonard rebaptisé Musée d’Art et d’Histoire de Provence en 1977, de trop rares expositions consacrées au peintre, une en 1957, une autre en 2006, voilà que progressivement semble s’éloigner la présence du peintre à Grasse.
Pourtant la Villa Maubert, transformée en Villa Musée Fragonard par la ville, conserve un trésor. En ses murs ce sont les derniers feux créateurs du peintre en cette fin du XVIIIe siècle que l’on peut encore admirer aujourd’hui. Ce patrimoine, dont l’histoire est complexe et mal documentée, est unique et original, il justifie pleinement de mettre en lumière Jean-Honoré Fragonard dans la capitale des parfums.
L’œuvre et la vie de Jean-Honoré Fragonard, peintre génial, sont bien intimement associées à Grasse. Avec cette première exposition d’été, «Un Provençal aux Pays-Bas», c’est ce que les musées de Grasse veulent réaffirmer en s’efforçant d’initier un nouveau cycle de travaux et de recherches consacré à cet enfant du pays grassois.
Olivier Quiquempois
Conservateur du patrimoine
Directeur des Musées de Grasse

Grasse et Fragonard

Cage d’escalier de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard
Jean-Honoré Fragonard est né à Grasse en 1732 mais il déménage à Paris avec ses parents dès 1738. Dès lors le lien entre le peintre et sa ville natale pourrait sembler assez ténu ; pourtant son épouse Marie-Anne Gérard est également grassoise et accouche à Grasse, en 1780, de leur fils Alexandre-Evariste.
Ces éléments sont des preuves assez marquantes de l’attachement réel du peintre avec sa ville.
Puis, en 1790, il quitte Paris pour se retirer un peu plus d’un an chez son cousin Maubert dans une grande bâtisse à un jet de pierre de l’enceinte et de la porte Royale, entrée sud-ouest de Grasse. C’est dans cette bastide, qu’il va réaliser un étonnant décor en grisaille dans la cage d’escalier et qu’il va réemployer pour le grand salon, en les complétant d’autres panneaux, les tableaux peints pour Mme Du Barry en 1771 initialement destinés au pavillon neuf du château de Louveciennes.

Rachetée par la ville dans les années 1970, la bastide devient naturellement la Villa-musée Jean-Honoré Fragonard en 1977. Après des travaux de rénovation de près de deux ans, la villa-musée a rouvert en avril 2015. Ce monument historique se veut un espace d’échanges et d’expositions consacré à la diffusion et à la valorisation des recherches menées sur Fragonard et sur son entourage.

Cette exposition dossier, «Fragonard : un provençal aux Pays-Bas», à la fois modeste par sa taille et les délais très courts de conception, et ambitieuse par sa thématique originale et les œuvres inédites ou peu connues qui seront présentées, inaugure ce projet scientifique dès cet été. Espérons aussi que cette première exposition - la dernière remonte à l’année 2006, bicentenaire de la mort de l’artiste - initiera désormais un cycle régulier d’expositions et de publications. La légitimité de la villa- musée sera renforcée et confortée par cette programmation annuelle et estivale afin de contribuer de manière significative au rayonnement de l’œuvre de Jean-Honoré Fragonard.

L'exposition dossier Fragonard : Un Provençal aux Pays-Bas

Jean-Honoré Fragonard est un peintre voyageur, à l’époque - le XVIIIe siècle - où le voyage prend une dimension majeure dans l’éducation et la compréhension du monde par les élites intellectuelles.
Bien sûr, chaque année ou presque depuis Colbert, le jeune lauréat de l’Académie royale de peinture à Paris gagnait Rome pour un séjour de formation de plusieurs années. C’est ce que fera Fragonard en 1756 parcourant une bonne partie de la péninsule jusqu’en 1761. En 1773, il repart avec sa femme et un richissime mécène, Jacques-Onésyme Bergeret, pour un périple italien qui s’achèvera par l’Autriche et l’Allemagne. Ces deux voyages sont bien documentés par les journaux tenus par les compagnons de voyages de Fragonard et par de nombreux échanges épistolaires. Ceux-ci ont donné lieu à plusieurs publications et expositions ; nous ne citerons que celle organisée par les musées de Grasse, en 2001, consacrée au second voyage : «Fragonard et le voyage en Italie 1773 - 1774».

A l’inverse, ses déplacements en Flandres et en Hollande, dont nombre de dessins attestent de manière à peu près certaine, demeurent encore largement méconnus et sujets à bien des interrogations.
Ce dossier est pourtant fondamental pour cerner la carrière de Fragonard : les influences des grands maîtres du Nord, Rubens, Rembrandt, van Dyck, mais aussi celles des artistes spécialisés dans le paysage ou la scène de genre sont des clés indispensables pour prendre toute la mesure de son œuvre et de son évolution.

Les goûts des amateurs et des mécènes français qui s’intéressent de plus en plus à la peinture septentrionale au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle viennent renforcer la nécessaire étude de ce, ou ces, voyages aux Pays-Bas de Fragonard.
A travers quelques œuvres, tableaux et dessins peu connus voire inédits, et la publication d’un catalogue, l’exposition dossier de cet été «Fragonard : un provençal aux Pays-Bas» (du 1er juillet au 30 septembre 2016 à la Villa-musée Jean-Honoré Fragonard) s’efforce de faire une synthèse et l’état des connaissances sur ce sujet passionnant qui met en lumière toute la complexité d’une œuvre inclassable.

Pratique

Villa musée Jean-Honoré Fragonard
Cette élégante maison de campagne de la fin du XVIIe siècle, agrémentée d’un magnifique jardin aux palmiers majestueux, abrite les œuvres du célèbre peintre grassois Jean-Honoré Fragonard et de ses descendants.
Ce chantre de l’amour galant peignit quatre superbes scènes intitulées «Les Progrés de l’Amour» pour la Comtesse du Barry, favorite du roi. Aujourd’hui, de splendides répliques de ces tableaux ornent les salons du musée. Outre les dessins et tableaux originaux de cet artiste, on découvre dans la cage d’escalier, une étonnante décoration en trompe-l’œil, attribuée à Jean-Honoré Fragonard, par Pierre Rosenberg.

Adresse :
23 boulevard Fragonard, 06130 Grasse
Tél. +33 (0)4 93 36 52 98
Ouverture de 13h00 à 19h00.

Pierre Aimar
Mis en ligne le Mardi 7 Juin 2016 à 19:40 | Lu 741 fois
Pierre Aimar
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