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Grande nuit du piano symphonique, décembre 2017, salle du Théâtre Toursky, Marseille

Quand un ténor, un orchestre et des pianistes enflamment le théâtre Toursky
Soirée d’enchantement en ce froid samedi de décembre 2017. La salle du Théâtre Toursky accueillait des artistes exceptionnels pour un programme musical de haute tenue.



Luca Lombardo, ténor marseillais à la voix d’or

Luca Lombardo. Photo Marc Larcher
Luca Lombardo. Photo Marc Larcher
Luca Lombardo est né à Marseille. Lauréat de plusieurs concours internationaux –Caruso de Milan, Prix Georges Thill, Concours des Voix d’Or, Concours Vinas de Barcelone…- Sa carrière internationale le conduit sur les scènes les plus prestigieuses. Il excelle dans tous les rôles de Ténor lyrique italien et français. Entré sur scène sous un tonnerre d’applaudissements, sa voix au timbre chaud, patiné, nuancé, s’élève sur la chanson napolitaine de Rodolfo Falvo : « Dicitencello Vuje ». L’émotion est palpable, laissant place à un déchainement de ‘bravo’.
Le talent précède ce fils de la cité phocéenne, soufflé par le mistral jusqu’au théâtre. Le célébrissime « Nessun Dorma » (Turandot) de Puccini est interprété avec maestria, puissance et passion. Du grand Luca Lombardo. Pour conclure, le ténor à la voix de soleil entonne « O sole mio » d’Eduardo di Capua, reprise en chœur par le public. Et c’est une explosion de joie. Luca Lombardo quitte la scène sous les acclamations.
Nicolas Bourdoncle
Luca Lombardo est admirablement servi au piano par Nicolas Bourdoncle, jeune et talentueux pianiste. L’accompagnement au piano est exercice difficile pour un jeune concertiste qui doit reconsidérer sa position personnelle et son rapport à la musique. Nicolas Bourdoncle possède les qualités indispensables pour mettre en valeur le chanteur : technique parfaite, concentration et régularité rythmique, tempo, nuances d’interprétation, témoignant d’un respect, d’une disponibilité, d’une écoute qui sont le cachet d’un parfait musicien.

Jean-Philippe Dambreville et l’orchestre Darius Milhaud

Grande nuit du piano symphonique, décembre 2017, salle du Théâtre Toursky, Marseille
« Susciter la passion, raisonner la tempête »
Voici en quelques mots un raccourci de ce que la baguette et le talent de Jean-Philippe Dambreville répercutent dans son orchestre et bien sûr, dans la salle. L’orchestre du conservatoire Darius Milhaud d’Aix en Provence prend place sur la scène, dirigé par le sémillant Jean-Pierre Dambreville. Directeur du Conservatoire, d’Aix-en-Provence, trompettiste, premier prix des CNR en direction d’orchestre. Sous son impulsion, l’orchestre va transcender les spectateurs comme c’est le cas partout où il se produit, en France, en Europe et aux Etats Unis.

Exaltante et émouvante Alexandra Lescure

Grande nuit du piano symphonique, décembre 2017, salle du Théâtre Toursky, Marseille
Alexandra Lescure, charmante jeune femme, cheveux blonds sagement retenus sur une robe noire de gala, s’installe au piano. Lauréate, entre autre, du Concours International des Nuits Pianistiques, elle est passionnée d’improvisation et se produit régulièrement en récital et en soliste en France et à l’étranger. La belle et célèbre « Rhapsodie in Blue » de Gershwin qu’elle interprète ne déroge pas à sa « patte ». Œuvre pour piano et orchestre, combinant musique classique et jazz, la finesse, la maîtrise, la passion d’Alexandra vibrent sur les cordes de son instrument. Magnifiquement appuyée par l’orchestre dirigé par Jean-Pierre Dambreville, Alexandra exalte l’œuvre de Gershwin, jouant à l’américaine, très jazzée : exquis le trille du départ suivi du glissendo ; les solos sont intenses et rythmés, les mouvements orchestraux, lents, riches, amples. Alexandra lescure apporte le dynamisme syncopé, le tempo, les notes « blues », faisant de ce moment pianistique, un délice.

Exceptionnel Michel Bourdoncle

Grande nuit du piano symphonique, décembre 2017, salle du Théâtre Toursky, Marseille
On ne présente plus Michel Bourdoncle. Pianiste et pédagogue, il poursuit une carrière de concertiste internationale qui le conduit, du « Carnegie Hall » de New York au Grand Théâtre de Shangai, sur les plus grandes scènes mondiales. En 1993, à Aix-en-Provence, il crée le très suivi Festival international « Les Nuits Pianistiques », dont il est le directeur artistique. Au piano, Michel Bourdoncle possède une démesure qui lui permet d’incarner l’intensité dramatique et la dimension poétique du Concerto de Brahms op 15 en ré mineur, un concerto triste, véritable monument symphonique, qu’il interprète. Michel Bourdoncle apporte à l’œuvre une troublante originalité, avec des couleurs musicales magnifiques, des mélodies et des rythmes intenses, une sorte de brume où s’immiscent une lumière enivrante, une chaleur romantique, une flamme propre à l’œuvre de Brahms. Le pianiste mêle bonheur, détresse, volupté, force, par un jeu débordant de dextérité et de passion. L’orchestre donne au piano et à ce concerto son impétuosité et sa mesure, sa densité. Le final, haletant, puissamment romantique, soulève d’enthousiasme un public conquis.
Cédant à plusieurs rappels, Michel Bourdoncle exécute « Polichinelle » de Villa-Lobos : clarté et vivacité, toucher magique et performance rarement égalés, édifiant !

Un chef d’orchestre facétieux et enjôleur

Grande nuit du piano symphonique, décembre 2017, salle du Théâtre Toursky, Marseille
Pour terminer avec éclat cette soirée de réjouissances, l’orchestre entame avec brio « Danzon n° 2 » d’Arturo Marquez fusionnant ses accords à ceux particulièrement harmonieux de la pianiste Mélanie Bracale. Le Danzon est une danse et un genre musical d’origine cubaine. Avec Mélanie et Jean-Pierre Dambreville, c’est le soleil, le Mexique et les rythmes latino, jusqu’aux boucles du chef, qui virevoltent.
Un bis est accordé par l’orchestre avec un « Mambo » de Léonard Bernstein, étourdissant, jubilatoire. Une soirée de soutien splendide dans une salle comble –et comblée- offerte par les artistes au théâtre Toursky et à ses spectateurs, dont la recette revient intégralement au théâtre.

Des artistes solidaires pour un théâtre d’exception

Car, en effet, explique Richard Martin en début de spectacle, « cela fait partie de ces soirées de résistance qui vont nous permettre de faire redémarrer l’espace Léo Ferré construit en 2013 qui est l’objet de nos préoccupations. Cela fait vingt ans que nous nous battons pour cet espace poétique qui a permis, qui permet et qui a même sauvé beaucoup de jeunes compagnies dans cette région, sa mission étant de permettre aux artistes émergeant et à de jeunes compagnies qui existent depuis très longtemps, et ne sont soutenues que de cette façon-là, d’avoir un lieu où ils peuvent présenter leurs créations avec une série de représentations.
On comprend combien il est important pour la culture, ici à Marseille, d’avoir cet espace jumelé qui, permet aux jeunes compagnies, profitant de la réputation internationale de ce théâtre, d’avoir une vitrine à leur mesure pour se faire connaître et reconnaître. Après 20 ans de « bagarre » -cet espace avait été décidé quand Robert Vigouroux était encore Maire de Marseille et il a fallu attendre 2013 pour qu’il existe enfin- on a donné à Richard Martin l’assurance formelle que tout ce qui a été fabriqué en 2013 serait pérennisé et aussi que cet espace Léo Ferré qui porte le nom de son frère poète soit soutenu et aidé politiquement, qu’il y aurait une volonté politique sur Marseille. Il en a reçu l’assurance verbale.

« Je ne désespère pas d’espérer »
« Or aujourd’hui on a droit à des paroles en l’air, continue le Directeur du Théâtre Toursky. Je ne le savais pas. Enfin, je supputais, mais je viens d’en avoir l’expérience vive, ne croyez plus à ce qu’on vous dit dans les périodes électorales. Je suis de cette naïveté, que, quand je commence à aimer les gens, je fonds, et si on me dit tu es le plus grand, le plus beau le plus fort, je le crois et si on me dit ne vous inquiétez pas Richard Martin vous avez mon soutien. Merci monsieur et je l’attends. Je l’ai attendu trois ans et il n’est pas venu, ce qui a mis le Toursky lui-même en danger. Ce n’est pas le Toursky qui est en défaut d’une quelconque comptabilité qui ne se serait pas faite comme il le faudrait. J’ai pris sur le toursky les moyens de faire fonctionner ce 2e théâtre qui a très bien fonctionné aussi mais qui a une jauge réduite et il faut vraiment avoir des moyens pour qu’il puisse tourner. M’inquiétant, je suis allé reposer la question qui tue « où on en est ? » et là on m’a dit qu’on n’en était nulle part. Je n’ai pas rêvé et je continue à penser qu’aujourd’hui on peut encore taper dans la main des hommes pour sceller des paroles. Jusqu’à ce que je n’aie plus de souffle, en ce qui me concerne, ceux qui taperont dans ma main sauront me trouver et je continue d’espérer car je ne désespère pas d’espérer qu’à force d’y croire les autres y croiront aussi et qu’enfin nous respirerons en harmonie en se fiant à la parole des gens. »

Richard Martin remercie tous les artistes qui se sont mobilisés pour ce soutien, tous les artistes qui sont venus à la rescousse. 8 galas de soutien, tous fréquentés avec un amour partagé, car le Toursky est un lieu à part, un lieu de culture, de solidarité et de fraternité.
« Je veux leur dire ma tendresse à ces artistes rares, accourus sachant que nous étions en difficulté, et ce n’est pas la première fois. Je n’ai même pas eu besoin de demander à quiconque. Quand ils ont su qu’une fois encore nous étions en danger, ils m’ont dit « nous arrivons ». Nous n’avons pas eu besoin de signer quelque papier que ce soit. Je veux remercier ce soir avec tendresse la bande à Michel Bourdoncle puisque Nicolas, Alexandra, tous sont là ce soir, mais aussi Luca Lombardo qui a été un de mes interprètes magnifiques de Carmen. Lui aussi, malgré le travail énorme qu’il est en train d’effectuer, entre deux trains pour être là ce soir, a tenu sa parole et est au rendez-vous. Je n’oublie pas Mélanie Bracale que j’ai vue pour la première fois lors d’une soirée de soutien avec François Tomasi et son papa qui est un violoniste magnifique. Tout cela sous la conduite de notre chef d’orchestre Jean-Philippe Dambreville avec qui je vais travailler « l’histoire du soldat » adapté par Marianne Sergent. C’est encore un compagnon de route nouveau qui je pense continuera la route avec moi jusqu’au bout. Je vous embrasse avec le cœur. Merci. »
Retrouvez Alexandra Lescure au piano accompagné du narrateur Etienne Kippelen dans « CHOPIN, une Vie en Musique » le 13 mars 2018 à 21h
Ainsi que Jean-Philippe Dambreville dans « L’Histoire du Soldat », lors du 23e festival russe, une des œuvres majeures d’Igor Stravinsky. Création avec Richard Martin, Marianne Sergent et les musiciens sous la Direction de J.P Dambreville. Mardi 20 mars à 20h 30.
Danielle Dufour-Verna

Pratique

Théâtre Toursky
16, Passage Léo Ferré
13003 Marseille (parking à 3 mn à pied)
Tel 04 91 02 58 35.
Programmation 2018 sur www.toursky.fr

Danielle Dufour-Verna
Mis en ligne le Samedi 6 Janvier 2018 à 04:15 | Lu 1224 fois

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