Le Paradis sans retour [Aradis, Onheur, Idéal, 3ème volet], représentation à St-Etienne, Rive de Gier, Lyon

Au coeur de la nuit tout semble possible, la vie est en suspens, on refait le monde sans se limiter au réalisable. Au coeur de la nuit, quelques figures (anges ? hommes ? esprits ?) imaginent ce que serait le paradis. Celui qu'on gagne après la mort, celui qu'on cherche toute une vie, celui qui n'existe pas aujourd'hui. A quoi ressemble ce paradis dont on ne revient pas ?


Mené par quatre comédiens et un musicien, construit à partir de textes non théâtraux, jouant avec les différentes conceptions du bonheur, le Paradis sans retour est une fantaisie joyeuse et musicale, une bulle onirique au milieu du réel, une tentative enthousiaste mais illusoire d'atteindre l'intangible...

Conception et mise en scène : Hugues Chabalier
Assistante à la mise en scène: Shams el Karoui
Jeu : Jérôme Baëlen, Maïanne Barthès, Flora Brunier et Judicaël Jermer
Musique : Pierrick Monnereau
Lumière : Aurélien Guettard

Représentations
Du 17 au 20 mai 2011, Saint-Étienne, Théâtre du Verso
21 mai 2011 Rive de Gier, L’Imprimerie
Du 25 au 31 mai 2011 Lyon, Théâtre des Marronniers

Au théâtre des Marronniers :
Représentations, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi à 20 h 30, dimanche à 17 h, lundi à 19 h
Théâtre des Marronniers, 7 rue des Marronniers, 69002 LYON - Métro Bellecour
Tarifs : 14 €, étudiants – 25 ans : 12 €, jeunes -16 ans : 11€ - Tarif unique le jeudi : 11 €
Réservations 04 78 37 98 17 et sur www.theatre-des-marronniers.com

Notes d'intention

Il existe peu de textes théâtraux sur le paradis. Nous portons donc sur la scène une matière textuelle brute, non théâtrale au départ. On pourra ainsi parcourir la galaxie des théories et conceptions du bonheur sans que le spectacle en propose une définition figée. Et cela permettra une traversée des sensations, des sentiments, des errances et des joies que la recherche du paradis procure.

Au départ : dans une nuit propice aux rêves, fantasmes et autres affabulations, 4 personnes, jamais éloignés de la tentation du sommeil (antichambre de la mort ?), font route vers le paradis. Qui sont-ils : anges, esprits, hommes errant dans les limbes ? Quatre côte à côte incarnant chacun une conception du bonheur.

D’abord, le commercial, le vendeur, l’illusionniste prêt à vendre un bonheur en kit, avec son cortège d’efficaces slogans, de chansonnettes idiotes et de prêt-à-penser comme « achète cela et tu seras heureux ». Quelque chose à voir aussi avec les promesses de bonheur sans fin que prodiguent les religions. C’est le bonimenteur auquel on a envie de croire. Et besoin de croire ?

Il y a aussi le naïf, le simple adepte d’un bonheur joli, le coureur après son enfance. Le bonheur est-il un art d’imbéciles (heureux, évidemment) ? Et aussi le philosophe, le chercheur, jamais à court de questions, ni de réponses -il en a toujours quinze possibles- autant de doutes et partant, de remises en question. Cercle infini. Mais joie de réfléchir ? Bonheur d’être « ignorant » ? La sagesse du philosophe est de s’accommoder avec son ignorance, peut-être…

Et avec eux trois, le sujet à la mélancolie, (« le bonheur d’être triste » selon Hugo...), le désespéré inguérissable, l’éternel insatisfait ; ce serait comme un philosophe qui n’a pas trouvé la sagesse, un qui ne se contente pas du réel, qui cherche un idéal, quitte à ce qu’il soit artificiel. Voire dangereux. Celui que rien ne pourrait convaincre à part le retour au néant…

Quatre cherchent à convaincre et à se convaincre avant tout ; ils sont perdus et pourtant sûrs d’eux-mêmes. A l’image de chacun d’entre nous, persuadés de connaître ce qui ferait ou fait notre bonheur mais livrés à l’incertain, au fragile, à l’éphémère d’un instant de félicité. En lutte et en recherche, candidats au bonheur. Rêves, désirs, souhaits ; on est sous le règne du conditionnel. De l'onirisme. Onirisme porté également par la musique, enveloppante comme un cocon ouaté. Le musicien est là, cinquième larron, jouant en direct, compagnon, gardien comme celui de Huis Clos ou Saint-Pierre silencieux (le paradis et l’enfer sont-ils si opposés ?).

Le bonheur glisse. On part à sa recherche et sitôt aperçu, sitôt disparu. Le temps a une importance primordiale. Il faut faire durer le bonheur. Le rendre éternel. Mais aussi retrouver le bonheur passé et gagner le paradis futur. Mélange des temps et le paradis perdu (l’enfance ?) rejoint le paradis à atteindre, se confond avec lui. Le spectacle entremêle ces différentes temporalités.

Pour conclure la trilogie du paradis, je souhaitais donc une création qui rappelle les deux premières : la divagation, la réflexion, les questionnements incessants, le délire métaphysique comme dans le Jardin de reconnaissance et l’utopie d’un lieu comme le paradis rappellant celle d’Entreprise de recueillement.

Une création qui conclut en se tournant vers l'effacement, la mort, le vide. Ce paradis qui nous attend n’est-il pas un objectif aussi séduisant que dangereux ? Pour le gagner, le passage obligé est la mort. Mort et paradis, amis fidèles. La fin du Paradis sans retour semble sans appel ; le bonheur éternel serait tragique, forcément tragique…
La trilogie se termine avec la disparition, l’effacement, on est « sans retour ». On l’avait entamée avec les origines et le jardin d’Eden. Et on l’avait continuée en regardant comment obtenir un bonheur immédiat, sur Terre, aujourd’hui.
Le paradis, où l’origine et la fin se rejoignent sans nous laisser beaucoup de temps. Il reste des tentatives, des élans, des espoirs. Heureusement.

Pierre Aimar
Mis en ligne le Mardi 12 Avril 2011 à 19:47 | Lu 740 fois
Pierre Aimar
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