Les Suppliantes © Théâtre du Gymnase
Le Roi Pélasgos qui reçoit leur requête, veut bien les accueillir malgré tous les risques que cela comporte pour son pays. Quand un héraut égyptien le menace de la guerre au nom des prétendants, il lui répond courageusement, et les fugitives, agenouillées en suppliantes au pied des Dieux de la Cité, sont reçues avec honneur.
Cette tragédie, par l'importance de l'élément lyrique, ressemble plus à une cantate qu'à un drame : c'est un chant en l'honneur de l'hospitalité. Il est à peu près certain que Les Suppliantes formaient la première pièce d'une trilogie dont la seconde s'appelait Les Egyptiens, et la troisième, Les Danaïdes, qui les représentait, selon la légende, comme des criminelles, meurtrières de leurs cousins, à l'exception d'Hypermestre qui, épargnant Lyncée, donnait naissance à la race royale d'Argos.
Tragédie de la justice divine dans un monde où règne la violence, et qui se meut dans le mystère et la peur, Les Suppliantes exprime aussi l'idée que les hommes, responsables de leurs actes, vivent en fonction des devoirs qui les pressent. Responsables, ils le sont par rapport aux Dieux et par rapport au groupe dont ils ont la charge, et qu'à tout moment ils risquent d'entraîner dans un désastre. Cette responsabilité politique qui anime le Roi Pélasgos donne ainsi de ce personnage l'image d'un chef qui ne se présente pas comme le reflet inquiet d'ordres divins.
Jean-Pierre Vincent remonte Les Suppliantes avec quarante comédiens amateurs dans une nouvelle traduction polie de Kevin Keiss qui marque nettement le sens du texte grec, fait sentir sa qualité poétique, en évitant les lourdeurs et en reformulant les passages altérés ou inintelligibles. La belle scénographie de Camille Vallat, espace d'orchestra aux parois bleu marine, décorée de statuettes de dieux et pourvu d'une skéné surélevée, côté jardin, permet aux choristes parées de robes grenat, de fichus et de foulards, de se déplacer aisément, de courir ou de réaliser toutes sortes de figures de suppliantes abattues ou de femmes révoltées. Quoique leur déclamation ne soit pas toujours soutenue, franche ou bien timbrée, en regard de celle des trois personnages masculins, Danaos, le Roi ou le Héraut égyptien, elle donne du moins au spectateur tout loisir d'admirer la mise en scène de Jean-Pierre Vincent, qui assisté de Marie Provence et Caroline Ruiz, a su tirer du texte des hypothèses vraisemblables sur la conduite de l'action dans les épisodes les plus pathétiques des Suppliantes: par exemple, au moment où le roi entre en méditation, au milieu des Danaïdes, en se comparant au pêcheur d'éponges ivre, incapable de supporter la plongée, ou lorsque les Egyptiens, brigadiers en main, cherchent à s'emparer de ces femmes tremblantes, en frappant le plateau de plusieurs coups, et en imposant sur le théâtre cet esprit de démesure qui caractérise les premières tragédies athéniennes du Ve siècle.
Philippe Oualid
Cette tragédie, par l'importance de l'élément lyrique, ressemble plus à une cantate qu'à un drame : c'est un chant en l'honneur de l'hospitalité. Il est à peu près certain que Les Suppliantes formaient la première pièce d'une trilogie dont la seconde s'appelait Les Egyptiens, et la troisième, Les Danaïdes, qui les représentait, selon la légende, comme des criminelles, meurtrières de leurs cousins, à l'exception d'Hypermestre qui, épargnant Lyncée, donnait naissance à la race royale d'Argos.
Tragédie de la justice divine dans un monde où règne la violence, et qui se meut dans le mystère et la peur, Les Suppliantes exprime aussi l'idée que les hommes, responsables de leurs actes, vivent en fonction des devoirs qui les pressent. Responsables, ils le sont par rapport aux Dieux et par rapport au groupe dont ils ont la charge, et qu'à tout moment ils risquent d'entraîner dans un désastre. Cette responsabilité politique qui anime le Roi Pélasgos donne ainsi de ce personnage l'image d'un chef qui ne se présente pas comme le reflet inquiet d'ordres divins.
Jean-Pierre Vincent remonte Les Suppliantes avec quarante comédiens amateurs dans une nouvelle traduction polie de Kevin Keiss qui marque nettement le sens du texte grec, fait sentir sa qualité poétique, en évitant les lourdeurs et en reformulant les passages altérés ou inintelligibles. La belle scénographie de Camille Vallat, espace d'orchestra aux parois bleu marine, décorée de statuettes de dieux et pourvu d'une skéné surélevée, côté jardin, permet aux choristes parées de robes grenat, de fichus et de foulards, de se déplacer aisément, de courir ou de réaliser toutes sortes de figures de suppliantes abattues ou de femmes révoltées. Quoique leur déclamation ne soit pas toujours soutenue, franche ou bien timbrée, en regard de celle des trois personnages masculins, Danaos, le Roi ou le Héraut égyptien, elle donne du moins au spectateur tout loisir d'admirer la mise en scène de Jean-Pierre Vincent, qui assisté de Marie Provence et Caroline Ruiz, a su tirer du texte des hypothèses vraisemblables sur la conduite de l'action dans les épisodes les plus pathétiques des Suppliantes: par exemple, au moment où le roi entre en méditation, au milieu des Danaïdes, en se comparant au pêcheur d'éponges ivre, incapable de supporter la plongée, ou lorsque les Egyptiens, brigadiers en main, cherchent à s'emparer de ces femmes tremblantes, en frappant le plateau de plusieurs coups, et en imposant sur le théâtre cet esprit de démesure qui caractérise les premières tragédies athéniennes du Ve siècle.
Philippe Oualid