Manouchian, de Mélinée Manouchian. Editions Parenthèse, Collection Diasporales

1944. Dans l’après-midi du 21 février, vingt-deux membres d’un mouvement de résistance communiste, les Francs-tireurs et partisans - Main-d’œuvre immigrée (FTP‑MOI), sont fusillés au Mont-Valérien.


Le procès de ceux que l’histoire retiendra comme étant le « Groupe Manouchian » avait suscité l’acharnement de la presse collaborationniste. Pour cause : vingt d’entre eux étaient des étrangers (arméniens, polonais, italiens, espagnols, hongrois, roumains…), parmi lesquels onze juifs.​ Dans les jours qui suivirent leur exécution, une affiche de propagande SS était placardée sur les murs de nombreuses villes de France, montrant les visages de cette « armée du crime ». Ce sera « l’Affiche rouge » qui, ironie de l’histoire, érigera ces hommes en héros du combat contre l’occupant. Entre 1941 et 1943, le groupe conduit par Missak Manouchian s’était distingué par des actions de résistance, depuis l’assassinat de hauts fonctionnaires nazis jusqu’au sabotage de lignes de chemin de fer et d’installations militaires allemandes. Le témoignage de la compagne de lutte de Missak, Mélinée Manouchian, est irremplaçable. Il est suivi ici de documents, certains inédits, qui éclairent d’un jour nouveau la personnalité de cette grande figure de la Résistance, également poète et passionné d’art et de musique.

Les fusillés du Mont-Valérien :
Celestino Alfonso, espagnol, 27 ans  ; Olga Bancic, roumaine, 32 ans (seule femme du groupe arrêtée, décapitée en Allemagne le 10 mai 1944)  ; Joseph Boczov, hongrois, 38 ans  ; Georges Cloarec, français, 20 ans  ; Rino Della Negra, italien, 19 ans  ; Thomas Elek, hongrois, 18 ans  ; Maurice Fingercwajg, polonais, 19 ans  ; Spartaco Fontanot, italien, 22 ans  ; Jonas Geduldig, polonais, 26 ans  ; Emeric Glasz, hongrois, 42 ans  ; Léon Goldberg, polonais, 19 ans  ; Szlama Grzywacz, polonais, 34 ans  ; Stanislas Kubacki, polonais, 36 ans  ; Cesare Luccarini, italien, 22 ans  ; Missak Manouchian, arménien, 37 ans  ; Armenak Arpen Manoukian, arménien, 44 ans  ; Marcel Rajman, polonais, 21 ans  ; Roger Rouxel, français, 18 ans  ; Antoine Salvadori, italien, 24 ans  ; Willy Schapiro, polonais, 29 ans  ; Amedeo Usseglio, italien, 32 ans  ; Wolf Wajsbrot, polonais, 18 ans  ; Robert Witchitz, français, 19 ans.

Mélinée Manouchian (1913-1989), née Sukemian à Constantinople-Istanbul, est issue d'une famille arménienne

Son père, qui occupait un poste de direction dans l'administration des Postes ottomanes, fut tué lors du génocide des Arméniens en 1915. Pour les protéger, sa mère place Mélinée et sa sœur Armènouhi dans une institution américaine à Adabazar. En 1922, à la suite de la Catastrophe de Smyrne, elles sont évacuées en urgence vers un orphelinat à Corinthe, en Grèce. En 1926, Mélinée et sa sœur arrivent en France en tant que réfugiées apatrides. Elles poursuivent leurs études à l'école arménienne Tebrotzassère à Marseille, puis à Paris à partir de 1927. Mélinée obtient un diplôme de sténodactylo et se rapproche du HOC, le Comité de secours pour l'Arménie, où elle rencontre Missak en 1934. Ils se marient en 1936. Passionnés par la justice et la liberté, ils participent aux manifestations du Front populaire et se mobilisent pour les Républicains espagnols. Mélinée rejoint la résistance aux côtés de son mari. Elle se charge de missions de transport d'armes pour les résistants, d'évasion vers les réseaux de résistance, de dactylographie et de distribution de tracts. Parmi ceux qui l'aident à se cacher après l'arrestation de Missak et de ses compagnons, on compte la famille Aznavourian, celle de Charles Aznavour. En tant que résistante et épouse de résistant, elle est activement recherchée par la Gestapo. Après la guerre, fidèle aux écrits de la dernière lettre de Missak Manouchian, elle part en Arménie soviétique pour y apporter ses archives, carnets, poèmes et autres écrits. Elle ne pourra revenir à Paris que 18 ans plus tard. De 1948 à 1962, en URSS, elle enseigne le français à l'Institut de littérature de Erevan. Vivant modestement, elle s’attache à publier les poèmes de Missak Manouchian, en revue ou en volume. À son retour, elle s'engage à perpétuer la mémoire des 23 résistants de l'Affiche Rouge, le Groupe Manouchian. En 1986, le président François Mitterrand lui décerne la distinction de Chevalier de la Légion d'honneur. Elle est inhumée au cimetière d’Ivry-sur-Seine, aux côtés de Missak Manouchian et de 13 sépultures des membres du groupe. Mélinée Manouchian, veuve du héros de l'Affiche Rouge, Missak Manouchian, est la première et principale biographe de son mari et de ses compagnons d’armes.

Info+

MANOUCHIAN
Mélinée Manouchian
Témoignage suivi de poèmes, lettres et documents inédits
Préface de Katia Guiragossian  
Collection : Diasporales
16,5 x 23 cm,
320 pages,
photographies, documents, 2023.
ISBN 978-2-86364-444-7
Prix : 24 €

Pierre Aimar
Mis en ligne le Mercredi 15 Novembre 2023 à 20:47 | Lu 288 fois
Pierre Aimar
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