Cartographies - hervé di rosa : aux frontières de l’art modeste
« Les cartes d’Hervé Di Rosa illustrent les territoires de l’art modeste, afin d’en dévoiler le paysage mental.
Comment faire une carte de ce qui n’a pas de frontières ? Comment localiser ce qui est sans lieu, préciser ce qui est vague, organiser ce qui ne cesse de changer ?
Les cartes semblent impuissantes à répondre à ces questions, elles dont l’objet est bien de délimiter, de situer et de nous orienter grâce à un ensemble de mesures relevées sur le terrain à partir desquelles il est possible de calculer et d’indiquer ensuite, sur des lignes de longitudes et de latitudes, les positions que nous souhaitons connaître au moyen de diverses conventions (codes de couleur, grilles, échelles etc.) La carte ou le planisphère traduit sur un plan général des informations locales et singulières. [...]
Or on peut envisager l’existence de cartes qui ne s’intéressent pas seulement aux quantités mais aussi aux qualités, des cartes d’intensité dont le tracé nous semble a priori problématique car l’on se demande bien comment traduire cette hétérogénéité que la cartographie n’a cessé de vouloir réduire dans le cadre orthonormé qui est le sien. Cartographier l’art modeste relève d’une gageure de ce genre quand on lit, par exemple, au début du texte intitulé « Recherche de définition » : « L’art modeste est plutôt un sentiment des choses, une certaine manière de les percevoir, plus que les choses elles-mêmes. » Peut-on mesurer ce sentiment, lui assigner des frontières ? À partir de quand est-il possible de décider s’il constitue un critère suffisant pour nous dire que nous sommes en présence d’un art modeste ? » Gilles A. Tiberghien
Comment faire une carte de ce qui n’a pas de frontières ? Comment localiser ce qui est sans lieu, préciser ce qui est vague, organiser ce qui ne cesse de changer ?
Les cartes semblent impuissantes à répondre à ces questions, elles dont l’objet est bien de délimiter, de situer et de nous orienter grâce à un ensemble de mesures relevées sur le terrain à partir desquelles il est possible de calculer et d’indiquer ensuite, sur des lignes de longitudes et de latitudes, les positions que nous souhaitons connaître au moyen de diverses conventions (codes de couleur, grilles, échelles etc.) La carte ou le planisphère traduit sur un plan général des informations locales et singulières. [...]
Or on peut envisager l’existence de cartes qui ne s’intéressent pas seulement aux quantités mais aussi aux qualités, des cartes d’intensité dont le tracé nous semble a priori problématique car l’on se demande bien comment traduire cette hétérogénéité que la cartographie n’a cessé de vouloir réduire dans le cadre orthonormé qui est le sien. Cartographier l’art modeste relève d’une gageure de ce genre quand on lit, par exemple, au début du texte intitulé « Recherche de définition » : « L’art modeste est plutôt un sentiment des choses, une certaine manière de les percevoir, plus que les choses elles-mêmes. » Peut-on mesurer ce sentiment, lui assigner des frontières ? À partir de quand est-il possible de décider s’il constitue un critère suffisant pour nous dire que nous sommes en présence d’un art modeste ? » Gilles A. Tiberghien
Architectures modestes : Patrick Bouchain
Vue intérieure du MIAM et des vitrines de Bernard Belluc. Photo de François Lagarde
Patrick Bouchain a réaménagé le MIAM, dans un ancien chai à vin de la ville de Sète. Il a aussi développé une conception politique, sociale et culturelle de l’architecture, regrettant qu’elle soit devenue l’affaire protégée de certains experts. Selon lui, l’architecture comporte une dimension fondamentalement populaire, non seulement dans sa construction, puisqu’elle est une œuvre collective (l’architecte ne construit pas seul), mais aussi dans ses usages, puisque tout le monde s’en sert.
Patrick Bouchain a travaillé sur la reconversion de friches en lieux culturels, et sur des architectures scénographiques.
Patrick Bouchain a travaillé sur la reconversion de friches en lieux culturels, et sur des architectures scénographiques.
Liliana motta - Le jardin des plantes modestes
Liliana Motta, Éloge du dehors, 2000
Le jardin du MIAM conçu par Liliana Motta raconte l’histoire des plantes qui sont généralement considérées comme des « mauvaises herbes », plus gênantes qu’utiles. Les botanistes appellent ces plantes des « adventices », quand il s’agit de plantes étrangères introduites, volontairement ou pas, par l’homme.
On pourrait aussi voir les faits autrement et considérer ces plantes en termes écologiques comme des pionnières d’une succession secondaire, des transformateurs de lieux en cours de changement. Pourtant ces plantes participent à la mémoire des lieux et, à travers l’explication de leur présence, c’est notre histoire qui nous est racontée.
On pourrait aussi voir les faits autrement et considérer ces plantes en termes écologiques comme des pionnières d’une succession secondaire, des transformateurs de lieux en cours de changement. Pourtant ces plantes participent à la mémoire des lieux et, à travers l’explication de leur présence, c’est notre histoire qui nous est racontée.
Atelier Ezekiel Messou
Atelier Ezekiel Messou, Sans titre, 2022
Ezekiel Messou est né en 1971 au Bénin. À seize ans, il fuit un père autoritaire et part pour le Nigeria. De 1990 à 1995, à Lagos, il apprend le métier de réparateur de machines à coudre, estimant que « les pêcheurs, les tailleurs ou les maçons sont trop nombreux sur le lac, alors que personne ne saurait faire ce métier...». À l’intérieur de son atelier de réparation de machines à coudre, il continue à remplir des cahiers d’écolier, format A5, quadrillés au millimètre dans lesquels il inventorie les modèles qui lui passent entre les mains. L’enjeu n’est plus de différencier absolument les multiples marques et modèles mais de construire, à partir d’un schéma minimal, un système de représentation décliné et des motifs de plus en plus stylisés.
Michel Gondry : PQ Ville
Michel Gondry et Sylvain Arnoux, PQ Ville, maquette et décor du film La Science des rêves. Photo de Pierre Schwartz
« Michel Gondry est le créateur de PQ Ville, une maquette de ville imaginaire, conçue en papier toilettes.
Pour reprendre le contrôle de ses rêves, Stéphane décide d’y infliger un cataclysme total et d’orchestrer la reconstruction d’une ville sur laquelle il régnera. Pour cela il concocte une machine lui permettant de visionner des images de catastrophes naturelles superposées à des paysages divers. Sa machine est fabriquée à partir d’anciens rouleaux de papier toilette qui ont l’effet optique de mélanger différentes sources d’images. Comme tout va de travers dans cette histoire, le cortex de Stéphane, influencé tant par la machine elle-même que par les images qu’elle projette, matérialise la nouvelle cité essentiellement avec ces rouleaux de carton. Les éléments qui se retrouvent dans nos rêves ne sont jamais ceux que l’on attend. Et la ville, expression de la mégalomanie créative de son auteur est finalement constituée du résidu d’années d’essuyage de fesses. »
Michel Gondry, septembre 2010, extrait, Catalogue Les Territoires de l’Art Modeste, Michel Gondry, 2010, Ed. Invenit.
Pour reprendre le contrôle de ses rêves, Stéphane décide d’y infliger un cataclysme total et d’orchestrer la reconstruction d’une ville sur laquelle il régnera. Pour cela il concocte une machine lui permettant de visionner des images de catastrophes naturelles superposées à des paysages divers. Sa machine est fabriquée à partir d’anciens rouleaux de papier toilette qui ont l’effet optique de mélanger différentes sources d’images. Comme tout va de travers dans cette histoire, le cortex de Stéphane, influencé tant par la machine elle-même que par les images qu’elle projette, matérialise la nouvelle cité essentiellement avec ces rouleaux de carton. Les éléments qui se retrouvent dans nos rêves ne sont jamais ceux que l’on attend. Et la ville, expression de la mégalomanie créative de son auteur est finalement constituée du résidu d’années d’essuyage de fesses. »
Michel Gondry, septembre 2010, extrait, Catalogue Les Territoires de l’Art Modeste, Michel Gondry, 2010, Ed. Invenit.
Bodys Isek Kingelez
Bodys Isek Kingelez, Ville de Sète en 3009, 2000, Photo de Pierre Schwartz
Sur la demande du MIAM et de son Président Hervé Di Rosa, Bodys Isek Kingelez crée la maquette Sète en 3009 à Sète de juin à août 2000. Durant son séjour il a parcouru la ville pour s’en imprégner totalement.
Dans l’œuvre Sète en 3009, à mi-chemin entre réalité et fiction et comme très souvent dans les mégapoles de Kingelez, les styles architecturaux se côtoient sans parti pris hiérarchique.
À propos de ces « architectures maquettiques » Kingelez dit « Il n’y a pas de police dans cette ville, il n’y a pas de soldats pour la défendre et pas de médecins pour soigner les malades. C’est une ville paisible où tout le monde est libre, c’est une ville qui ne respire que la joie, la beauté de la vie, c’est un creuset de toutes les races du monde, ici vous vivez comme au paradis… »
Dans l’œuvre Sète en 3009, à mi-chemin entre réalité et fiction et comme très souvent dans les mégapoles de Kingelez, les styles architecturaux se côtoient sans parti pris hiérarchique.
À propos de ces « architectures maquettiques » Kingelez dit « Il n’y a pas de police dans cette ville, il n’y a pas de soldats pour la défendre et pas de médecins pour soigner les malades. C’est une ville paisible où tout le monde est libre, c’est une ville qui ne respire que la joie, la beauté de la vie, c’est un creuset de toutes les races du monde, ici vous vivez comme au paradis… »
Étienne Robial
Étienne Robial, Alphabet du MIAM, 2000
Compagnon historique du MIAM, Étienne Robial a conçu en 2000 son premier logo ainsi qu’un alphabet pour l’accompagner.
En 1972, Robial rachète avec sa compagne Florence Cestac, Denis Ozanne et Jean-Claude De Repper, la librairie parisienne Futuropolis. Ils créent, dans la foulée, une maison d’édition éponyme spécialisée dans la bande dessinée d’auteur et la réédition de classiques. Futuropolis se distingue par le soin minutieux apporté à la conception de ses albums, de la typographie au grammage du papier.
Étienne Robial construit un système fondé sur l’emploi d’une typographie d’une grande lisibilité en majuscules, le Futura, qu’il redessine pour son adaptation à l’écran. Par ailleurs, chaque programme est doté d’une police de titrage spécifique. Étienne Robial introduit dans le champ audiovisuel sa science du livre. Un terme nouveau est forgé pour définir ce type d’intervention : l’habillage télévisuel, qu’Étienne Robial va ensuite concevoir aussi pour la Sept (ex ARTE, 1986), M6 (1987), RTL TV (1993).
En 1972, Robial rachète avec sa compagne Florence Cestac, Denis Ozanne et Jean-Claude De Repper, la librairie parisienne Futuropolis. Ils créent, dans la foulée, une maison d’édition éponyme spécialisée dans la bande dessinée d’auteur et la réédition de classiques. Futuropolis se distingue par le soin minutieux apporté à la conception de ses albums, de la typographie au grammage du papier.
Étienne Robial construit un système fondé sur l’emploi d’une typographie d’une grande lisibilité en majuscules, le Futura, qu’il redessine pour son adaptation à l’écran. Par ailleurs, chaque programme est doté d’une police de titrage spécifique. Étienne Robial introduit dans le champ audiovisuel sa science du livre. Un terme nouveau est forgé pour définir ce type d’intervention : l’habillage télévisuel, qu’Étienne Robial va ensuite concevoir aussi pour la Sept (ex ARTE, 1986), M6 (1987), RTL TV (1993).
Étienne Mineur
Étienne Mineur, Spirogami, 2021
Les spirogamis sont des sculptures de papier en forme de spirale, entièrement montés à la main. Étienne Mineur, l’inventeur des spirogamis, est un designer, éditeur et enseignant français, dont le travail est axé sur les relations entre graphisme et interactivité.
En 1999, il cofonde le studio de design Incandescence qui réalise des sites internet et des CD-Rom pour des maisons de haute couture (Chanel, Yves Saint Laurent, Issey Miyake), des designs d’interface (Nokia) ou des catalogues d’exposition (Fondation Cartier).
En 2009, il décide de revenir vers le design lié aux objets physiques. Il fonde Volumique qui est une maison d’édition, mais aussi un studio d’invention, de conception et de développement de nouveaux types de jeux, de jouets et de livres, basé sur la mise en relation du tangible et du numérique. Parallèlement, Étienne Mineur enseigne (à l’École Louis Lumière, l’École européenne supérieure d’art de Bretagne, l’Académie Centrale des beaux-arts de Pékin…) et est invité régulièrement pour des conférences et des manifestations en France et à l’étranger.
En 1999, il cofonde le studio de design Incandescence qui réalise des sites internet et des CD-Rom pour des maisons de haute couture (Chanel, Yves Saint Laurent, Issey Miyake), des designs d’interface (Nokia) ou des catalogues d’exposition (Fondation Cartier).
En 2009, il décide de revenir vers le design lié aux objets physiques. Il fonde Volumique qui est une maison d’édition, mais aussi un studio d’invention, de conception et de développement de nouveaux types de jeux, de jouets et de livres, basé sur la mise en relation du tangible et du numérique. Parallèlement, Étienne Mineur enseigne (à l’École Louis Lumière, l’École européenne supérieure d’art de Bretagne, l’Académie Centrale des beaux-arts de Pékin…) et est invité régulièrement pour des conférences et des manifestations en France et à l’étranger.
Papiers d’agrumes. Hervé Di Rosa. Art des collections
Papiers d’agrumes, Collection O. Lachenal
« Souvent l'amateur d’art modeste n’aime pas se dire collectionneur. D’ailleurs, il ne l’est pas vraiment. En général, il ne le devient jamais à proprement parler, même si son goût s’affirme, même si sa connaissance s’approfondit. II n’aime pas un objet plus qu’un autre. ll aime amasser autour d’ un thème plus que de partir à la recherche d’un objet particulier. Il rassemble les signes d’une époque, accumule un patrimoine caractéristique, sans présenter nécessairement les éléments les plus rares. En revanche, il peut acheter quinze fois le même objet Parfois ses préférences sont passagères. Parfois, il ramasse et conserve des choses sans très bien savoir pourquoi. Puis les accumulations prennent un sens. Il ne collectionne plus à l’aveuglette. II suit une ligne, d’abord incertaine sans doute, mais qui se révèle rapidement implacable. Parce qu’il suit une pulsion profonde. À la rigueur, qu’importe les objets ? Il succombe à l’attraction qu’il subit. [...]
Il fait souvent fi de la rigueur des collectionneurs et acquiert un objet abîmé qui lui procurera autant de plaisir qu’un objet rare. [...] II est surtout attaché à l’âme, à l’histoire de l’objet. [...]
Le collectionneur d’art modeste s’attache au plaisir que les choses lui procurent dans l’immédiateté et ne se pose ni question existentielle ni question esthétique. Il leur redonne une signification, il sort des lapins d’un chapeau, des sous-bocks d’un carton, des billes d’un tiroir, des pichets d’un placard, et c’est peut-être cela la grandeur de l’art modeste : croire aux choses telles qu’elles sont et à homme tel qu’il est. Collecter, collectionner a toujours été l’apanage des pays occidentaux. Depuis longtemps, on entrepose les objets trouvés autour du monde dans des cabinets de curiosités. Véritables phénomènes d’art modeste, car souvent présentés sans aucune rigueur scientifique, ils donnaient à voir tout et n’importe quoi. Les cabinets de curiosités des XVIIe et XVIIIe siècles représentent cet état d’esprit : ils réunissent, avec un grand soin dans leur présentation, les objets les plus inattendus et les plus divers. »
Hervé Di Rosa, L’Art modeste, 2007.
Edit. Hoëbeke
Il fait souvent fi de la rigueur des collectionneurs et acquiert un objet abîmé qui lui procurera autant de plaisir qu’un objet rare. [...] II est surtout attaché à l’âme, à l’histoire de l’objet. [...]
Le collectionneur d’art modeste s’attache au plaisir que les choses lui procurent dans l’immédiateté et ne se pose ni question existentielle ni question esthétique. Il leur redonne une signification, il sort des lapins d’un chapeau, des sous-bocks d’un carton, des billes d’un tiroir, des pichets d’un placard, et c’est peut-être cela la grandeur de l’art modeste : croire aux choses telles qu’elles sont et à homme tel qu’il est. Collecter, collectionner a toujours été l’apanage des pays occidentaux. Depuis longtemps, on entrepose les objets trouvés autour du monde dans des cabinets de curiosités. Véritables phénomènes d’art modeste, car souvent présentés sans aucune rigueur scientifique, ils donnaient à voir tout et n’importe quoi. Les cabinets de curiosités des XVIIe et XVIIIe siècles représentent cet état d’esprit : ils réunissent, avec un grand soin dans leur présentation, les objets les plus inattendus et les plus divers. »
Hervé Di Rosa, L’Art modeste, 2007.
Edit. Hoëbeke
Info+
À LA FENÊTRE
27, rue Frédéric-Peyson
34000 Montpellier
Ouverte du mercredi au samedi de 15h à 19h
Entrée 3€
Du jeudi 27 octobre 2022 au samedi 4 février 2023
Vernissage le 26 octobre
À partir de 18H
27, rue Frédéric-Peyson
34000 Montpellier
Ouverte du mercredi au samedi de 15h à 19h
Entrée 3€
Du jeudi 27 octobre 2022 au samedi 4 février 2023
Vernissage le 26 octobre
À partir de 18H