A la découverte de la nouvelle école du chant français
© Delestrade - ACN
Importée de l’Opéra de Rouen Normandie, cette Folle Journée, signée par les duettistes Beaumarchais / Mozart, mérite bien son nom. Dans les décors de Stephan Grögler (costumes de Véronique Seymat), la mise en scène du décorateur himself laisse par bonheur la place aux intermittences du cœur, à la subtilité, à la mélancolie même.
Les portes claquent, les gifles volent, on se court après, on se rattrape, on s’épie, on se déguise, on badine érotiquement, on s’aime enfin dans une vie scénique sans emphase, une quotidienneté presque banale, avec heureusement ce climat chargé d’électricité qui fait de cette folle journée, comme alimentée à la gégène, véritablement, une journée de dingue.
C’est fin, intelligent, sans faute de goût, d’un classicisme et modernisme luxueux, réjouissant. Passe bien sûr dans cette mascarade, où nobles et valets restent toujours à leur place, l'ombre de la Règle du Jeu de Renoir, idée première du metteur en scène...
Le temps n’est plus où les théâtres montaient Les Noces de Figaro avec des voix et des techniques à peine suffisantes pour célébrer celles de Jeannette. Le goût et les exigences du public ont heureusement évolué face à l’univers mozartien et les directeurs d’opéra ont aujourd’hui à cœur de présenter cet ouvrage avec un réel souci d’authenticité et de style.
Encore une fois, c’est le personnage de Cherubin qui catalyse la fantaisie. Perdu dans l’ambiguïté de ses désirs, complètement poétisé, il traverse les murs, comme irréel. Par son timbre et son jeu, Albane Carrère rallie tous les suffrages et gagne notre cœur.
Très "smart", avec ce côté parfois brut de décoffrage mais au chant parfois racé, moderne enfin, le Figaro très light de Yoann Dubruque trouve en la Suzanne délurée et spirituelle de Norma Nahoun une belle complicité musicale et théâtrale.
Le Comte de David Lagares ne pâlit jamais de ce voisinage. Un rien libidineux voire priapique (une idée déjà vue quelque part), il affirme de bout en bout sa vraie autorité. Vocalement, ce noble espagnol n’encourt aucune vraie critique. Maria Miro isole sa Comtesse - encore trop Rosine dans le port et l'allure - en un médaillon d'émotion distillées où les airs n'égalent pas toujours les ensembles.
Parfaitement caractérisés, les seconds rôles tirent habilement leur épingle du jeu. La poignée de choristes aussi. On soulignera en revanche le Bartolo de Yuri Kissin,la Marcellina lourdement croquée par Jeanne-Marie Lévy, et la double composition d'Eric Vignau en Basilio/Curzio sortis d'une caricature de Hoggart.
Il devient assez rare d’entendre un Mozart pathétique. Simplicité et naturel caractérisent l’approche du chef Carlos Aragon (à la tête d’un Orchestre Régional Avignon-Provence en état de grâce) qui mène fosse et plateau avec une fougue de mille feux, un esprit tout à fait inattendu, non dénué de recueillement. L’on assiste alors à un Mozart parfois douloureux où la comédie qui se joue voit les protagonistes avoir mal et faire également souffrir. Nous n’avons jamais droit à une simple fête galante et tout cela fleure bon l’impertinence.
Christian Colombeau
Les portes claquent, les gifles volent, on se court après, on se rattrape, on s’épie, on se déguise, on badine érotiquement, on s’aime enfin dans une vie scénique sans emphase, une quotidienneté presque banale, avec heureusement ce climat chargé d’électricité qui fait de cette folle journée, comme alimentée à la gégène, véritablement, une journée de dingue.
C’est fin, intelligent, sans faute de goût, d’un classicisme et modernisme luxueux, réjouissant. Passe bien sûr dans cette mascarade, où nobles et valets restent toujours à leur place, l'ombre de la Règle du Jeu de Renoir, idée première du metteur en scène...
Le temps n’est plus où les théâtres montaient Les Noces de Figaro avec des voix et des techniques à peine suffisantes pour célébrer celles de Jeannette. Le goût et les exigences du public ont heureusement évolué face à l’univers mozartien et les directeurs d’opéra ont aujourd’hui à cœur de présenter cet ouvrage avec un réel souci d’authenticité et de style.
Encore une fois, c’est le personnage de Cherubin qui catalyse la fantaisie. Perdu dans l’ambiguïté de ses désirs, complètement poétisé, il traverse les murs, comme irréel. Par son timbre et son jeu, Albane Carrère rallie tous les suffrages et gagne notre cœur.
Très "smart", avec ce côté parfois brut de décoffrage mais au chant parfois racé, moderne enfin, le Figaro très light de Yoann Dubruque trouve en la Suzanne délurée et spirituelle de Norma Nahoun une belle complicité musicale et théâtrale.
Le Comte de David Lagares ne pâlit jamais de ce voisinage. Un rien libidineux voire priapique (une idée déjà vue quelque part), il affirme de bout en bout sa vraie autorité. Vocalement, ce noble espagnol n’encourt aucune vraie critique. Maria Miro isole sa Comtesse - encore trop Rosine dans le port et l'allure - en un médaillon d'émotion distillées où les airs n'égalent pas toujours les ensembles.
Parfaitement caractérisés, les seconds rôles tirent habilement leur épingle du jeu. La poignée de choristes aussi. On soulignera en revanche le Bartolo de Yuri Kissin,la Marcellina lourdement croquée par Jeanne-Marie Lévy, et la double composition d'Eric Vignau en Basilio/Curzio sortis d'une caricature de Hoggart.
Il devient assez rare d’entendre un Mozart pathétique. Simplicité et naturel caractérisent l’approche du chef Carlos Aragon (à la tête d’un Orchestre Régional Avignon-Provence en état de grâce) qui mène fosse et plateau avec une fougue de mille feux, un esprit tout à fait inattendu, non dénué de recueillement. L’on assiste alors à un Mozart parfois douloureux où la comédie qui se joue voit les protagonistes avoir mal et faire également souffrir. Nous n’avons jamais droit à une simple fête galante et tout cela fleure bon l’impertinence.
Christian Colombeau