Pablo Picasso, Nature morte à la tête antique, 1925 Huile sur toile, 97 x 130 cm Don de Paul Rosenberg, 1946 Paris, Musée national d’art moderne, Centre Pompidou, AM 2596P © collection Centre Pompidou, Dist RMN. Jacques Quecq d’Henripret © Succession Picasso, Paris, 2012
Sont donc confrontées dans cette exposition des oeuvres du XXe siècle et des sculptures ou céramiques gréco-romaines, mettant en évidence la ré-invention par ces artistes de l’antiquité plutôt que la seule influence de cette dernière sur leur production. Elle montre ainsi comment ils ont pu s’approprier ce passé en le rendant « moderne », et comment cela fut possible dans le contexte historique spécifique de l’Europe d’avant 1939.
Picasso, De Chirico, Léger et Picabia ont tous nourri leur imaginaire avec l’Antiquité classique tout en demeurant des figures radicales de l’art du XXe siècle. Ces artistes d’avant-garde ne cherchaient d’ailleurs pas à retrouver un passé perdu ; pour eux, l’antique – qu’ils connaissaient avant tout par la fréquentation des musées – est une dimension essentielle de la vie de leur époque.
En approfondissant diverses catégories thématiques – les histoires et les mythes, les corps et les figures, les objets et les fragments –, l’exposition définit plusieurs types de rencontre entre le modernisme et l’Antiquité. Les oeuvres antiques ont été choisies parce qu’elles évoquent certaines qualités esthétiques auxquelles les artistes modernes ont été sensibles et auxquelles ils ont réagi. D’ailleurs, en revisi¬tant l’Antiquité, les modernistes ont modifié par contre-coup la manière dont nous percevons aujourd’hui l’art classique.
Parmi les oeuvres modernes exposées, les plus anciennes sont des dessins exécutés par le jeune Picasso dans les années 1890 à partir de sculptures antiques. Ils sont suivis d’oeuvres de 1906, époque où, cherchant à réinventer la figure humaine, il s’intéresse à la statuaire grecque archaïque. Entre la Première Guerre mondiale et le milieu des années 1930, la découverte de nombreuses oeuvres d’art antiques – fresques murales de Pompéi, vases grecs peints, sculptures classiques – ouvrent de nouvelles directions dans son travail d’artiste figuratif. Picasso ne se contente pas de reprendre ces sources, et il est rare que l’on sente chez lui une préférence quelcon¬que pour un style ou un autre. En 1931, il illustre les Métamorphoses d’Ovide, mais, pour le reste, les mythes classiques ne sont pour lui qu’une simple liste de dieux, de héros, de monstres et de victimes dont il s’inspire et qu’il transforme pour raconter visuellement ses propres histoires.
Dans son contenu, l’exposition s’attarde plus particulièrement sur les années 1910 et 1920 en présentant le goût cohérent que manifestent alors De Chirico et Picasso pour les formes et l’imagerie antiques. Les figures de Picasso, simples et pleines de nuances, tranchent avec les images oniriques du De Chirico des années 1912-1919, qui reprend des fragments et des types anciens (notamment dans sa série d’Ariane) et qui associe l’antique à l’expérience moderne en introduisant des locomotives à vapeur ou des éléments d’architecture contemporaine.
Par comparaison, Léger et Picabia témoignent – comme le montrent les oeuvres sélectionnées ici – d’une démarche très différente dans leur mode de réappropriation des motifs antiques. Après sa période cubiste, Léger mécanise l’antique (souvent sous la forme de grands nus féminins), qu’il revisite ainsi dans le sens du progrès technique. Quant à Picabia, il procède après sa période Dada à un recyclage ambigu d’images classiques célèbres dans ses Transparences de la fin des années 1920 et du début des années 1930, série d’oeuvres où des hommes, des animaux et des végé¬taux superposent leurs contours en strates successives. Ces éléments proviennent de sources diverses, et notamment de sculptures romaines, de fresques pompéien¬nes et de peintures de la Renaissance ou de l’époque baroque. Léonce Rosenberg – qui fut le marchand d’art de tous les artistes exposés et l’un des premiers à croire au nouveau style de Picabia – commandite plusieurs Transparences pour une suite d’allégories qu’il présente en 1929, sous forme de panneaux, dans son appartement parisien.
Les dernières oeuvres de l’exposition sont des planches provenant de deux séries d’estampes : les lithographies de la série Mythologie de De Chirico, créées en 1934 pour illustrer un texte de Jean Cocteau, et la Suite Vollard (1933-1937), dans la-quelle Picasso fusionne la mythologie classique et son propre mythe d’artiste, ainsi qu’un choix d’oeuvres issues de la collection du musée d’Antibes, montrées pour la première fois depuis un demi-siècle dans la muséographie d’origine qui mêlait les oeuvres contemporaines à des antiquités et des moulages. En tout, « Une moderne Antiquité » présente une soixantaine d’oeuvres, sculptures et dessins et une quin¬zaine d’objets antiques comprenant des sculptures grecques et romaines, des vases attiques, un portrait de momie du Fayoum et un miroir étrusque.
L’exposition « Une moderne Antiquité : Picasso, De Chirico, Léger et Picabia en présence de l’antique » a été organisée par le J. Paul Getty Museum en collaboration avec le musée Picasso d’Antibes.
Les deux commissaires de l’exposition sont Christopher Green, professeur émérite au Courtauld Institute of Art, à Londres, et Jens Daehner, conservateur associé des antiquités au J. Paul Getty Museum, en Californie, avec Jean-Louis Andral, conser-vateur en chef du musée Picasso pour la présentation à Antibes.
Picasso, De Chirico, Léger et Picabia ont tous nourri leur imaginaire avec l’Antiquité classique tout en demeurant des figures radicales de l’art du XXe siècle. Ces artistes d’avant-garde ne cherchaient d’ailleurs pas à retrouver un passé perdu ; pour eux, l’antique – qu’ils connaissaient avant tout par la fréquentation des musées – est une dimension essentielle de la vie de leur époque.
En approfondissant diverses catégories thématiques – les histoires et les mythes, les corps et les figures, les objets et les fragments –, l’exposition définit plusieurs types de rencontre entre le modernisme et l’Antiquité. Les oeuvres antiques ont été choisies parce qu’elles évoquent certaines qualités esthétiques auxquelles les artistes modernes ont été sensibles et auxquelles ils ont réagi. D’ailleurs, en revisi¬tant l’Antiquité, les modernistes ont modifié par contre-coup la manière dont nous percevons aujourd’hui l’art classique.
Parmi les oeuvres modernes exposées, les plus anciennes sont des dessins exécutés par le jeune Picasso dans les années 1890 à partir de sculptures antiques. Ils sont suivis d’oeuvres de 1906, époque où, cherchant à réinventer la figure humaine, il s’intéresse à la statuaire grecque archaïque. Entre la Première Guerre mondiale et le milieu des années 1930, la découverte de nombreuses oeuvres d’art antiques – fresques murales de Pompéi, vases grecs peints, sculptures classiques – ouvrent de nouvelles directions dans son travail d’artiste figuratif. Picasso ne se contente pas de reprendre ces sources, et il est rare que l’on sente chez lui une préférence quelcon¬que pour un style ou un autre. En 1931, il illustre les Métamorphoses d’Ovide, mais, pour le reste, les mythes classiques ne sont pour lui qu’une simple liste de dieux, de héros, de monstres et de victimes dont il s’inspire et qu’il transforme pour raconter visuellement ses propres histoires.
Dans son contenu, l’exposition s’attarde plus particulièrement sur les années 1910 et 1920 en présentant le goût cohérent que manifestent alors De Chirico et Picasso pour les formes et l’imagerie antiques. Les figures de Picasso, simples et pleines de nuances, tranchent avec les images oniriques du De Chirico des années 1912-1919, qui reprend des fragments et des types anciens (notamment dans sa série d’Ariane) et qui associe l’antique à l’expérience moderne en introduisant des locomotives à vapeur ou des éléments d’architecture contemporaine.
Par comparaison, Léger et Picabia témoignent – comme le montrent les oeuvres sélectionnées ici – d’une démarche très différente dans leur mode de réappropriation des motifs antiques. Après sa période cubiste, Léger mécanise l’antique (souvent sous la forme de grands nus féminins), qu’il revisite ainsi dans le sens du progrès technique. Quant à Picabia, il procède après sa période Dada à un recyclage ambigu d’images classiques célèbres dans ses Transparences de la fin des années 1920 et du début des années 1930, série d’oeuvres où des hommes, des animaux et des végé¬taux superposent leurs contours en strates successives. Ces éléments proviennent de sources diverses, et notamment de sculptures romaines, de fresques pompéien¬nes et de peintures de la Renaissance ou de l’époque baroque. Léonce Rosenberg – qui fut le marchand d’art de tous les artistes exposés et l’un des premiers à croire au nouveau style de Picabia – commandite plusieurs Transparences pour une suite d’allégories qu’il présente en 1929, sous forme de panneaux, dans son appartement parisien.
Les dernières oeuvres de l’exposition sont des planches provenant de deux séries d’estampes : les lithographies de la série Mythologie de De Chirico, créées en 1934 pour illustrer un texte de Jean Cocteau, et la Suite Vollard (1933-1937), dans la-quelle Picasso fusionne la mythologie classique et son propre mythe d’artiste, ainsi qu’un choix d’oeuvres issues de la collection du musée d’Antibes, montrées pour la première fois depuis un demi-siècle dans la muséographie d’origine qui mêlait les oeuvres contemporaines à des antiquités et des moulages. En tout, « Une moderne Antiquité » présente une soixantaine d’oeuvres, sculptures et dessins et une quin¬zaine d’objets antiques comprenant des sculptures grecques et romaines, des vases attiques, un portrait de momie du Fayoum et un miroir étrusque.
L’exposition « Une moderne Antiquité : Picasso, De Chirico, Léger et Picabia en présence de l’antique » a été organisée par le J. Paul Getty Museum en collaboration avec le musée Picasso d’Antibes.
Les deux commissaires de l’exposition sont Christopher Green, professeur émérite au Courtauld Institute of Art, à Londres, et Jens Daehner, conservateur associé des antiquités au J. Paul Getty Museum, en Californie, avec Jean-Louis Andral, conser-vateur en chef du musée Picasso pour la présentation à Antibes.