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Le Roi s'amuse, de Victor Hugo, Fêtes Nocturnes de Grignan, par Jacqueline Aimar

La pièce de Victor Hugo mise en scène par François Rancillac retrouve dans le décor du château de Grignan une verve et une cruauté que notre époque ne désavoue pas. Tout y est de la laideur et de la difformité du monde, tout d’abord celle de Triboulet, le fou du roi et celle aussi de cette cour - imaginaire, dit-on- de François 1er.


Car là, ils sont jeunes et ils sont beaux, ils sont bondissants et remuants, instables, trop pour mon goût et comme le roi, ils s’agitent par peur de s’ennuyer.
Mais Roi et courtisans, équivoques, un brin asexués, ils sont cruels et d’un cynisme extrême, et les femmes évoquées, perverses elles aussi. Même Dame Bérarde.
Sauf une.
Le petit ange, la pure enfant, née du difforme Triboulet et qu’il tient cachée à l’écart du monde. Là où personne ne viendrait la chercher. Dans le cul-de-sac Bussy. Par le choix même du lieu, Hugo tue tout espoir.
Et c’est là précisément qu’on va la découvrir et la prendre pour la maîtresse du bossu.
Ah les bossus ! personnages étranges et chargés de symboles, en bien ou en mal, détenteurs en tous les cas de pouvoirs venus des domaines de l’étrange avec lesquels leur bosse est censée les mettre en relation !

Bossu, Triboulet bicéphale

Celui-ci doté d’un double rôle, on pourrait dire tout en hypocrisie, porte à la cour la peau du cynisme, de la virevolte ironique, de la cruauté exacerbée par le milieu des courtisans, ne dédaignant pas parfois de demander des mises à mort. Mais paroles que tout cela ! Car l’homme est tout autre : le père est un tendre, rempli d’amour pour cette Blanche au nom si pur qu’il tient captive et qu’il adore du plus profond de lui-même. D’un amour irraisonné peut-être excessif, égoïste mais qu’il ne remet pas en cause.
Et comme dans les plus belles histoires romantiques, c’est de l’amour que vient le drame. Les interdits ont fait de Blanche une curieuse de la vie, dotée de l’impatience d’aimer ; le roi va s’amuser d’elle, (cela ressemble à un viol tout de même), et Triboulet se trouvera, malgré lui, meurtrier.
Il s’agit bien là de théâtre ; mais derrière le drame de cette pièce, c’est toutes les laideurs et les jalousies du pouvoir, toutes les haines, toutes les pourritures - et dieu sait que notre époque les connaît bien-, que le dramaturge et poète a mises en scène dans ce Roi qui s’amuse si mal.
Une pièce dure mais « vraie » au travers de laquelle on sent la révolte et l’envie de mordre qui enverront plus tard Hugo en exil, puis en exil recherché, si longtemps.
En bossu, un Denis Lavant exceptionnel, et souvent poignant, enlaidi et tourmenté, torturé dans le corps et l’esprit, difforme de partout ; et un roi, Florent Nicoud, irréfléchi, et admirablement inconséquent. Les costumes d’abord surprenants et clinquants trouvent aussi leur rôle, dans une mise en scène qui semble, en début de pièce se chercher, avant de séduire le spectateur par ses trouvailles de décor et d’allusions, la petite maison cachée cernée de blanc, puis la chambre rouge évoquant le bordel, ou cette échelle dressée vers l’absurde et tendue à Triboulet.
Victor Hugo, Grignan et des acteurs en forme font de ce spectacle une « grande cuvée » du théâtre. Sur cette grande terrasse du château qui s’anime chaque été, pour notre bon plaisir, comme disait François 1er.
Jacqueline Aimar

pierre aimar
Mis en ligne le Dimanche 4 Juillet 2010 à 08:31 | Lu 7048 fois

Commentaires articles

1.Posté par RUISSEAU le 08/08/2010 12:55
Pauvre Hugo... son texte est complétement noyé dans une gesticulation ridicule! Si l'on n'y croit pas, il ne faut pas le monter; On va me juger vieux jeu...mais c'est ce jeu-là qui se veut moderne qui est vieux! Les acteurs s'agitent comme de vieilles folles et les scènes crues n'apportent rien que du déjà vu! Le décor, qui a dû coûter fort cher est d'une laideur incommensurable. Et le pauvre Denis Lavant fait un exploit... mais je le sens dirigé par un "stupid boy" prétencieux! Le talent est là, mais ... bien mal employé!

2.Posté par RUISSEAU le 08/08/2010 16:24
Pauvre Victor Hugo... trahison, trahison. Pourquoi avoir demandé à Denis Lavant d'imiter Nicolas Sarkozy pour son Triboulet !? C'est grotesque!

3.Posté par imbert le 08/08/2010 16:57
Bonjour,

Cette pièce est bien loin de la tradition de théatre populaire présenté chaque été à Grignan. Ce festival est en train de s'embourgeoiser et de s'intellectualiser. Que dire de ce spectacle "tape à l'oeil "où tout brille d'une lumière artificielle teintée d'une vulgarité ostentatoire. J'ai eu honte d'avoir amener deux enfants de 9 et 11 ans face à certaines scènes obscènes et des attitudes outrancière à l'image de la femme! Par respect pour l'acteur principal, je suis resté jusqu'à la fin (merci à lui). FRED

4.Posté par RUISSEAU le 09/08/2010 16:43
Pauvre Victor Hugo... trahison, trahison. Pourquoi avoir demandé à Denis Lavant d'imiter Nicolas Sarkosy pour son Triboulet!? C'est grotesque!

5.Posté par Dumas le 13/11/2010 12:40
Une interprétation exceptionnelle, loin des clichés véhiculés par la tradition hugophobe. Une mise en scène intelligente, soignée. Ce qui est "tape à l'oeil", c'est la société artificielle de la Cour". Ce qui est obscène, c'est l'attitude des jeunes gens vis-à vis de la femme. "Un champ qui rapporte" dit le texte de Hugo. Un François Ier "bling bling" ? il l'était aussi, dépensant sans compter pour ses plaisirs et la parade. Vous lui trouvez une ressemblance avec un homme de pouvoir actuel ? On appelle ça "la distanciation" et c'est peut-être pour que le public réfléchisse à la soif de joui...

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