Gachet est également peintre et amateur de peinture, alors il sait de quoi il parle. Il fait raconter et mimer et vivre ce qui anime et tourmente van Gogh. Il s’enthousiasme avec lui et les deux hommes sont sur un pied d’égalité et de confiance. Le médecin accueille van Gogh dans sa maison, son salon et son jardin ; à sa table. Et ils parlent, tous les deux, pas seulement le patient.
Pourtant Vincent est pauvre et malade, sans dents, syphilitique, agité, tourmenté et a du mal à vivre. Dans la maison du Dr Gachet, on l’écoute et on l’admire, on lui demande de révéler son art et de vivre ses désordres et ses peines. Il y est bien.
Et de pair on s’enthousiasme pour la couleur. Gachet soigne l’artiste en le faisant plonger dans les couleurs et leurs sens, puisant dans leur force et leur beauté ce qu’il faut pour soigner Vincent, qui les évoque avec passion.
- « Mon visage est gris et rose… Mes yeux dont le vert ne changera jamais… Les cheveux cendrés rejetés au-dessus des rides du front. Affublé d’un sarrau bleu, de toile ordinaire mais propre. Le voilà achevé, Vincent ; le portrait de l’ami insupportable que tu es pour les autres mais surtout pour toi ! N’a-t-il pas tout de même fière allure, le bougre, campé face à son chevalet de campagne ? Manque-t-il quelque chose à son image ? Est-elle déformée ? Il semble que non…Es-tu bien celui que tu vois dans le miroir ? Suis-je bien cet autre apparu sur la toile ? »
Le peintre se révèle tout entier, dédoublement et finesse d’observation, lucidité et besoin de se voir de l’extérieur, problèmes d’identité, d’image, qui suis-je ?
Ou encore : « Voyez cher public: orangé sur la veste, la barbe, les cheveux… bleu sur la veste, le dessous des yeux, les cheveux. Jaune sur le cadre du tableau, le cou, le front, et toujours les cheveux…Jaune qui domine l’ensemble.
Sacrée couleur, nom de Dieu ! Mais pardon… »
Les deux hommes passent ensemble de longs moments, des soirées aussi, assis sur le banc dans le jardin d’Auvers-sur-Oise. Parole ouverte. Confidences et confiance.
Le lecteur se prend au jeu et se laisse aller lui aussi à l’observation de l’homme inquiet. Est-il fou parce qu’il se tranche un bout d’oreille ? Parce qu’il vend mal une peinture dont la valeur est aujourd’hui inestimable ?
Les titres des chapitres du livre constituent une forme de biographie du peintre ou font allusion à ses œuvres : « Les mangeurs de pommes de terre, La fiancée juive, Les tournesols, La nuit, Les étoiles, Autoportraits… » Ainsi l’homme qui doute tellement de lui-même, parfois aussi de son art, s’est-il représenté 43 fois sur ses tableaux dont 5 fois au moins en portraits qui contribuent à son image vraie.
L’auteur Philippe André qui est aussi psychiatre-psychanalyste et musicien se révèle incontestablement habile dans l’art de faire parler, de faire se révéler le malade, l’artiste, le peintre, le passionné, l’homme qui a des problèmes d’identité, qui souffre et qui doute. Il fait de lui, dans ce récit qui ressemble à une semi-confidence, un homme attachant et proche. Il le fait parler de son œuvre, il en fait crier les couleurs, et le livre lu, on en garde les lumières si passionnément vécues, dans les yeux et jusqu’au fond de la pensée.
Jacqueline Aimar
Pourtant Vincent est pauvre et malade, sans dents, syphilitique, agité, tourmenté et a du mal à vivre. Dans la maison du Dr Gachet, on l’écoute et on l’admire, on lui demande de révéler son art et de vivre ses désordres et ses peines. Il y est bien.
Et de pair on s’enthousiasme pour la couleur. Gachet soigne l’artiste en le faisant plonger dans les couleurs et leurs sens, puisant dans leur force et leur beauté ce qu’il faut pour soigner Vincent, qui les évoque avec passion.
- « Mon visage est gris et rose… Mes yeux dont le vert ne changera jamais… Les cheveux cendrés rejetés au-dessus des rides du front. Affublé d’un sarrau bleu, de toile ordinaire mais propre. Le voilà achevé, Vincent ; le portrait de l’ami insupportable que tu es pour les autres mais surtout pour toi ! N’a-t-il pas tout de même fière allure, le bougre, campé face à son chevalet de campagne ? Manque-t-il quelque chose à son image ? Est-elle déformée ? Il semble que non…Es-tu bien celui que tu vois dans le miroir ? Suis-je bien cet autre apparu sur la toile ? »
Le peintre se révèle tout entier, dédoublement et finesse d’observation, lucidité et besoin de se voir de l’extérieur, problèmes d’identité, d’image, qui suis-je ?
Ou encore : « Voyez cher public: orangé sur la veste, la barbe, les cheveux… bleu sur la veste, le dessous des yeux, les cheveux. Jaune sur le cadre du tableau, le cou, le front, et toujours les cheveux…Jaune qui domine l’ensemble.
Sacrée couleur, nom de Dieu ! Mais pardon… »
Les deux hommes passent ensemble de longs moments, des soirées aussi, assis sur le banc dans le jardin d’Auvers-sur-Oise. Parole ouverte. Confidences et confiance.
Le lecteur se prend au jeu et se laisse aller lui aussi à l’observation de l’homme inquiet. Est-il fou parce qu’il se tranche un bout d’oreille ? Parce qu’il vend mal une peinture dont la valeur est aujourd’hui inestimable ?
Les titres des chapitres du livre constituent une forme de biographie du peintre ou font allusion à ses œuvres : « Les mangeurs de pommes de terre, La fiancée juive, Les tournesols, La nuit, Les étoiles, Autoportraits… » Ainsi l’homme qui doute tellement de lui-même, parfois aussi de son art, s’est-il représenté 43 fois sur ses tableaux dont 5 fois au moins en portraits qui contribuent à son image vraie.
L’auteur Philippe André qui est aussi psychiatre-psychanalyste et musicien se révèle incontestablement habile dans l’art de faire parler, de faire se révéler le malade, l’artiste, le peintre, le passionné, l’homme qui a des problèmes d’identité, qui souffre et qui doute. Il fait de lui, dans ce récit qui ressemble à une semi-confidence, un homme attachant et proche. Il le fait parler de son œuvre, il en fait crier les couleurs, et le livre lu, on en garde les lumières si passionnément vécues, dans les yeux et jusqu’au fond de la pensée.
Jacqueline Aimar