© Opéra de Marseille
C’était sans compter sur la censure, puis le suicide du roi du contre-ut à Naples même, furieux et jaloux du jeune Duprez, mais surtout sur la mauvaise adaptation par Scribe du mélodramatique livret Salvatore Cammarano inspiré on le sait de la tragédie de Corneille.
Les Martyrs furent donc joués à l’Opéra dès 1840, avec son rival, dans un succès mitigé. Cette adaptation française, quant à elle, semble complètement avoir disparu du répertoire et attend encore sa résurrection.
Contrairement à ce que l’on croit, Poliuto n’est pas seulement un «opéra pour ténor», comme on le qualifie souvent. Loin d’avoir été négligés, la soprano et le baryton ont, eux aussi, des rôles intéressants, tant vocalement que scéniquement. La basse quant à elle joue le rôle du vilain, en perfide prêtre de Jupiter.
L’intrigue est connue pour qui connaît ses classiques Larousse ou Bordas. En Arménie, alors occupée par les Romains, Poliuto, nobliau du coin, s’est converti au christianisme en secret. Le général romain Severo est chargé par l’Empereur de faire appliquer les lois contre les chrétiens. Bien que fiancée à Severo – qu’elle aime toujours en secret, le cœur a ses raisons que le Sacré-Cœur ne connaît pas – au début de l’ouvrage, la femme de Poliuto, Paolina, finit, elle aussi, par se convertir. Les deux époux mourront en martyrs. Amen. Entre Fabiola et Quo Vadis, chacun trouvera son bonheur.
Poliuto en version de concert ? Pourquoi pas ? Toutes ces bondieuseries-péplums ont assez excité avec plus ou moins de talent et bonheur certains metteurs en scène ou décorateurs…
Plaisir donc de se concentrer sur une des partitions les plus riches de Donizetti, comme transition entre belcanto et mélodrame, sur un Donizetti désormais en pleine gloire, déjà tout projeté vers ces nouvelles innovations que Verdi fera siennes, avec, surtout dans le final du deuxième acte des relents identiques à la scène du triomphe d’une certaine Aida…
Alain Guingal n’a pas son pareil pour ranimer la flamme, tel un ancien combattant, persuadé qu’il est en train de diriger LE chef-d’œuvre du siècle, avec cette bonne volonté irrésistible et sympathique de converti du Feu de Dieu. Les voies lyriques du Seigneur resteront parfois impénétrables, mais son Golgotha survolté, surchauffé est de bout en bout admirable.
Daniella Dessi connaît bien sa Paolina. La voix de la sculpturale cantatrice génoise semble avoir beaucoup écouté sa plus illustre des consœurs. Suivez mon regard… Par sa sobriété, Daniella sait toutefois nous émouvoir par un dramatisme intense, personnel, qui n’appartient qu’à elle.
Le magnifique duo avec Severo (Vittorio Vitelli, immense baryton, d’une splendeur vocale qui rappelle l’âge d’or d’un bel canto révolu, superbe d’accents, d’autorité, de ton, de présence, de simple musicalité, d’une générosité presque insolente) se signera par un match nul pour les deux artistes sous les applaudissements d’un public plus que conquis.
On aurait aimé chez Massimiliano Pisapia un peu plus de nuances, d’émotion. Ce Poliuto, héroïque, brut de décoffrage, aura seulement séduit les amateurs de décibels, car un rien vériste. L’envol final sur le « son des harpes angéliques », pesant mais très cinématographique, le trouvera plus mesuré, conscient peut être du martyre à venir.
On a aimé également retrouver la voix de bronze de Wojtek Smilek, impressionnante, expressive, qui va si bien au « meuchant » Callistène.
Chœurs percutants malgré leur éloignement. Petits rôles forts bien distribués avec une mention au Nearco de Stanislas de Barbeyrac, à réentendre au plus vite dans un rôle plus consistant.
Encore une fois, le sympathique et dynamique Maurice Xiberras, Grand-Prêtre du lyrique à Marseille, luttant contre vents et marées contre les mécréants marchands du Temple de la Place Beauvau, peut être fier de son travail.
Christian Colombeau
Les Martyrs furent donc joués à l’Opéra dès 1840, avec son rival, dans un succès mitigé. Cette adaptation française, quant à elle, semble complètement avoir disparu du répertoire et attend encore sa résurrection.
Contrairement à ce que l’on croit, Poliuto n’est pas seulement un «opéra pour ténor», comme on le qualifie souvent. Loin d’avoir été négligés, la soprano et le baryton ont, eux aussi, des rôles intéressants, tant vocalement que scéniquement. La basse quant à elle joue le rôle du vilain, en perfide prêtre de Jupiter.
L’intrigue est connue pour qui connaît ses classiques Larousse ou Bordas. En Arménie, alors occupée par les Romains, Poliuto, nobliau du coin, s’est converti au christianisme en secret. Le général romain Severo est chargé par l’Empereur de faire appliquer les lois contre les chrétiens. Bien que fiancée à Severo – qu’elle aime toujours en secret, le cœur a ses raisons que le Sacré-Cœur ne connaît pas – au début de l’ouvrage, la femme de Poliuto, Paolina, finit, elle aussi, par se convertir. Les deux époux mourront en martyrs. Amen. Entre Fabiola et Quo Vadis, chacun trouvera son bonheur.
Poliuto en version de concert ? Pourquoi pas ? Toutes ces bondieuseries-péplums ont assez excité avec plus ou moins de talent et bonheur certains metteurs en scène ou décorateurs…
Plaisir donc de se concentrer sur une des partitions les plus riches de Donizetti, comme transition entre belcanto et mélodrame, sur un Donizetti désormais en pleine gloire, déjà tout projeté vers ces nouvelles innovations que Verdi fera siennes, avec, surtout dans le final du deuxième acte des relents identiques à la scène du triomphe d’une certaine Aida…
Alain Guingal n’a pas son pareil pour ranimer la flamme, tel un ancien combattant, persuadé qu’il est en train de diriger LE chef-d’œuvre du siècle, avec cette bonne volonté irrésistible et sympathique de converti du Feu de Dieu. Les voies lyriques du Seigneur resteront parfois impénétrables, mais son Golgotha survolté, surchauffé est de bout en bout admirable.
Daniella Dessi connaît bien sa Paolina. La voix de la sculpturale cantatrice génoise semble avoir beaucoup écouté sa plus illustre des consœurs. Suivez mon regard… Par sa sobriété, Daniella sait toutefois nous émouvoir par un dramatisme intense, personnel, qui n’appartient qu’à elle.
Le magnifique duo avec Severo (Vittorio Vitelli, immense baryton, d’une splendeur vocale qui rappelle l’âge d’or d’un bel canto révolu, superbe d’accents, d’autorité, de ton, de présence, de simple musicalité, d’une générosité presque insolente) se signera par un match nul pour les deux artistes sous les applaudissements d’un public plus que conquis.
On aurait aimé chez Massimiliano Pisapia un peu plus de nuances, d’émotion. Ce Poliuto, héroïque, brut de décoffrage, aura seulement séduit les amateurs de décibels, car un rien vériste. L’envol final sur le « son des harpes angéliques », pesant mais très cinématographique, le trouvera plus mesuré, conscient peut être du martyre à venir.
On a aimé également retrouver la voix de bronze de Wojtek Smilek, impressionnante, expressive, qui va si bien au « meuchant » Callistène.
Chœurs percutants malgré leur éloignement. Petits rôles forts bien distribués avec une mention au Nearco de Stanislas de Barbeyrac, à réentendre au plus vite dans un rôle plus consistant.
Encore une fois, le sympathique et dynamique Maurice Xiberras, Grand-Prêtre du lyrique à Marseille, luttant contre vents et marées contre les mécréants marchands du Temple de la Place Beauvau, peut être fier de son travail.
Christian Colombeau