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13e biennale de Lyon « La vie moderne », 10 sept 2015 au 3 janv 2016

Depuis sa création en 1991, Thierry Raspail, directeur artistique de la Biennale de Lyon, propose un mot aux commissaires qu’il invite. Ce mot vaut pour trois éditions.


La 13e Biennale ouvre une nouvelle trilogie avec le mot «moderne», que Thierry Raspail a donné à Ralph Rugoff, commissaire invité pour l’édition 2015. Ralph Rugoff répond à ce terme par un titre : La vie moderne. Il nous livre ses premières réflexions sur «moderne».

La vie moderne

La Biennale d’art contemporain de Lyon, intitulée La vie moderne, réunira des artistes explorant le caractère contradictoire et contingent du projet moderne tel qu’il s’est développé dans différentes régions du monde, aussi bien sur le plan de l’esthétique et de la philosophie que sur celui des formations sociales, de la subjectivité et de la technologie.
Les œuvres exposées refléteront les mutations permanentes tout comme les changements récents auxquels sont soumis nos scénarios de « vie quotidienne » ainsi que nos manières de voir et de penser.
La Biennale, toutefois, ne sera certainement pas l’occasion d’une interrogation sur le modernisme au sens classique du terme (qui est, me semble-t-il, un sujet sur lequel on s’est en vain acharné).
Dans ce titre, La vie moderne, il y a (inévitablement) une dimension ironique, qui tient en grande partie au fait que le mot « moderne » est de nos jours quelque peu anachronique. La notion de « monde moderne » est désormais devenue une sorte de curiosité, une relique historique d’un autre siècle. Ce mot, en effet – ou le concept même de « moderne » –, a été si largement et minutieusement déconstruit, critiqué, dénigré et galvaudé qu’il n’est plus aujourd’hui qu’une caricature de lui-même.
Pourtant, il est impossible de s’en débarrasser, comme de le laisser en paix.
Il y a toujours quelqu’un pour venir rectifier le « moderne ».
Ainsi nous retrouvons-nous aujourd’hui confrontés à une espèce de modernisme zombie : à chaque fois que nous pensons l’avoir définitivement achevé, il revient à la charge sous une autre forme et avec un tout autre objectif. (Là où le post-moderne a connu une fin atroce, il me semble que le moderne subsiste pour sa part dans un état proche de la demi-vie).
Dans le langage courant, évidemment, le mot « moderne » est utilisé pour « nouveau ». Mais il porte en lui l’ombre d’autres significations, qui naissent à mesure de la connaissance que nous avons de son histoire longue et complexe, et des différentes traditions modernes – en art, architecture, politique, musique pop et bien d’autres domaines. Ainsi, dire d’une chose qu’elle est « moderne », c’est la doter d’une aura d’incertitude.
Je pense qu’il s’agit là d’une évolution positive, car le « moderne » au sens classique du XXe siècle a souvent cherché à dissimuler son caractère contradictoire, et notamment ses liens problématiques et profonds qui l’unissent avec le non-moderne. (Il n’y a qu’à voir comment l’architecture moderne de Le Corbusier est née, en partie, de sa rencontre avec l’architecture en stuc des villages d’Algérie.)
Ce que nous considérions à une époque comme « moderne » était, en même temps, étroitement lié à l’histoire et aux cultures des territoires colonisés d’Afrique, des réfugiés des pays périphériques en Europe, etc.
Le « moderne », en d’autres termes, n’a jamais été conçu dans une éprouvette. Pas plus qu’il n’est une idée statique. Par conséquent ce que j’espère, c’est qu’aujourd’hui une discussion autour de « moderne » nous éclairera sur la façon dont il continue de s’étendre et de se développer, d’acquérir de l’épaisseur et de se charger de nuances, d’évoluer en s’adaptant à des contextes toujours nouveaux.

Pour finir, la seule dimension historique cruciale du « moderne » qui perdure actuellement est certainement, d’après moi, sa capacité à mettre en doute – non pas de s’embourber dans une mise en cause personnelle ou de recourir par défaut à un scepticisme universel systématique, mais bien de contester sans cesse le nouveau « normal », c’est-à-dire de reconsidérer et d’étudier les relations que nous entretenons les uns avec les autres, avec nos images, avec le monde qui nous entoure et les avancées technologiques, notamment.
Ralph Rugoff, septembre 2014

Ralph Rugoff

Ralph Rugoff est directeur de la Hayward Gallery à Londres. En poste depuis 2006, il y a assuré le commissariat de nombreuses expositions dont : The Painting of Modern Life (2007) Psycho Buildings: Artists Take On Architecture (2008), Invisible: Art About the Unseen, 1957- 2012 (2012), Alternative Guide to the Universe (2013), et The Human factor (2014), ainsi que des expositions monographiques comme celles consacrées à Ed Ruscha, George Condo, Jeremy Deller ou Tracey Emin…

Entre 2000 et 2006, il est directeur du Wattis Institute for Contemporary Art à San Francisco, où il organise une douzaine d’expositions dont Baja to Vancouver, le premier panorama d’artistes résidant le long de la Côte Ouest de l’Amérique du Nord, mais aussi des expositions individuelles d’artistes tels que Mike Kelley, Roni Horn, Thomas Hirschhorn, Ann Veronica Janssens, Mike Nelson…
Auparavant il travaille comme critique et commissaire indépendant, et organise des expositions à la Serpentine Gallery de Londres : The Greenhouse Effect (2000) ou encore au Hammer Museum de Los Angeles : Scene of the Crime (1997)… Sa première exposition, Just Pathetic (1990-91) figure, selon le magazine Artforum, parmi les expositions les plus influentes de la décennie.

Côté écriture, Ralph Rugoff contribue à des catalogues et livres sur l’œuvre de David Hammons, Paul McCarthy, Luc Tuymans, Michel Blazy, Jean-Luc Mylayne, ou encore sur le cinéaste Jean Painlevé. Par ailleurs, il est l’auteur de Circus Americanus, un recueil d’essais sur la culture visuelle populaire et l’architecture. En 2005, il a remporté l’inaugural Ordway Prize for Criticism and Curating décerné par la Penny McCall Foundation aux États-Unis.
Il est conseiller pour la Biennale de Sydney en 2002, et pour la Triennale de Turin en 2005. Plus récemment en 2010 il participe au comité de sélection du British Council au titre de la Biennale de Venise, et il siège en 2013 au jury du Turner Prize.

MODERNE #1 Premier rendez-vous le 19 nov 2014. Co-organisé par le macLYON et La Biennale de Lyon

Thierry Raspail invite Thomas Boutoux et François Piron de castillo/corrales à discuter le terme « moderne ».
Thomas Boutoux et François Piron intitulent cette journée « Moody» où ils interrogent la place et le rôle de l’humeur dans le vocabulaire des artistes.
Ils invitent plusieurs artistes, critiques d’art, écrivains et théoriciens dont Camille Blatrix (artiste) et Clara Schulmann (critique d’art).

Mercredi 19 novembre 2014
La journée se déroule en deux temps avec des conférences, discussions et projections d’extraits de films commentés :
- 15h30-17h30 à l’Amphithéâtre de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Lyon (ENSBA)
- 18h30-20h30 à la salle de conférences du macLYON
Accès libre
Réservation conseillée macLYON, 04 72 69 17 19, publics@mac-lyon.com
En partenariat avec l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Lyon (ENSBA)

Pierre Aimar
Mis en ligne le Vendredi 24 Octobre 2014 à 02:27 | Lu 103 fois

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