Les collections du musée
LEFRANC Jules, Penhoët, 1930, Les Sables-d'Olonne, musée de l'Abbaye Sainte-Croix, Les Sables-d'Olonne, musée de l'Abbaye Sainte-Croix,
En 1903, la Ville du Havre, encouragée par de grands amateurs d’art, achète à Camille Pissarro deux Vues du port du Havre qu’il venait de peindre, lors d’un séjour dans ce port normand. Elle devenait alors la première collectivité à faire entrer dans une collection publique française une œuvre de cet artiste, et ce à la veille de sa disparition.
Puis deux fonds importants entrent respectivement en 1936 et 2004 et proviennent des collections privées de deux grands négociants havrais : Charles-Auguste Marande et Olivier Senn.
La représentation du port
Longtemps idéalisée, inscrite dans une tradition classique héritée de Claude Lorrain, la représentation du port évolue peu du XVIIe au XVIIIe siècle. Le développement économique au XIXe siècle s’accompagne un peu partout en France, et en Europe, de profondes mutations du monde portuaire et du lancement de grands chantiers de modernisation, à mesure que disparaît la marine à voile.
La vision des artistes change alors. Le port cesse d’être ce lieu métaphorique du voyage pour devenir un monde vivant, débordant d’activité, un lieu d’échanges plein d’odeurs et de mouvements, un territoire bruyant et sonore qui commence à affirmer son autonomie.
Les artistes sensibles à la vie moderne ne pouvaient manquer de trouver là le parfait reflet de leur époque bouleversée par l’industrialisation. Leurs regards se portent désormais sur un nouveau paysage scandé par les silhouettes métalliques des ponts transbordeurs, des grues à vapeur. Ils embrassent dans leurs compositions les étendues dilatées des quais où se multiplient les entrepôts. Certains, plus attentifs à l’homme, décrivent sans complaisance le labeur harassant des débardeurs évoluant entre les cordages, les passerelles, les bites d’amarrage, les rails de chemin de fer et les ballots de marchandises.
Les transformations de la représentation de cet univers
L’exposition souligne les transformations de la représentation de cet univers, depuis les années 1850 jusqu’à la veille de la deuxième guerre mondiale, dans la peinture, la photographie, la sculpture et le dessin. Les années 1870 – 1920 font l’objet d’un examen plus approfondi avec les figures de Baldus, Boudin, Jongkind, Monet, Pissarro. Les incursions des pointillistes dans ce domaine seront abordées notamment à travers l’œuvre de Maximilien Luce, mais surtout la figure de Signac qui entreprend à la fin de sa vie une ambitieuse série d’aquarelles, « Les Ports de France », pour le collectionneur Gaston Lévy.
Albert Marquet, natif de Bordeaux et dont le musée de cette ville conserve l’un des plus importants fonds, est par excellence le grand peintre de ports du XXe siècle. Un ensemble conséquent de toiles évoquera la diversité des sites que l’artiste a parcouru tout au long de sa vie, de Marseille à Stockholm.
Une attention particulière sera portée aux artistes du Nord de l’Europe qui, sous l’influence du réalisme et du naturalisme, interrogent, avec une rudesse dont se ressent leur production, le monde bigarré des quais hollandais ou belges. La sélection confrontera les figures puissantes des dockers sculptées par Constantin Meunier aux visions sombres et mélancoliques de Van Mieghem ou abréviatives de Spilliaert.
L’appropriation décisive des nouveaux territoires portuaires structurés par de grandes lignes de force qui géométrisent le paysage a lieu avec l’avènement du cubisme. Des artistes comme André Lhote n’ont pas manqué de trouver là le prétexte à de nouvelles explorations plastiques.
La photographie et le « paysage portuaire », entre pittoresque et modernisme
La photographie des ports, nous invite à comprendre comment le port forme un motif aussi intéressant que l’est alors un paysage de bord de mer traditionnel. Elle traduit fort bien la « photogénie » des ports qui ne se démentira pas durant de nombreuses décennies.
Témoin et instrument de l’aménagement des zones portuaires, l’image photographique est aussi l’outil d’un imaginaire de ces lieux. Au même titre que la peinture ou la littérature, la photographie produit et diffuse les formes culturelles du port, un tissu de motifs qui dessinent peu à peu un imaginaire spécifique. Parmi eux, les bateaux deviennent un sujet de choix et le port devient ainsi un véritable petit théâtre de la mobilité tranquille dont découle toute une iconographie qui forme un véritable laboratoire de l’image du mouvement.
Le port contient ce « quotient » de modernité que lui confère sa double fonction traduite par le photographe, un port fonctionnel et pittoresque, à la fois lieu de travail et lieu de rêverie par l’idée même de voyage qu’il implique. Les nombreuses vues de construction de navires et d’ouvrages cultivent, par la monumentalisation des travaux, la célébration du progrès. Dans la grande tradition des vues de chantier, les photographes demandent aux ouvriers et à leurs contremaîtres de prendre la pose.
Une vision esthétique se dégage peu à peu de l’image des ports. Elle associe les vertus documentaires de la description des installations industrielles et le pittoresque de la vie des quais. Aux XIXe et XXe siècles, apparaît le « pictorialisme », le goût pour des images saturées par l’atmosphère remplace la clarté des documents techniques. On peut l’observer à travers l’album consacré au port de Hambourg (1908) avec des photographies de Schmidt et Kofahl ou bien dans la revue Camera Work, organe de la Photo-Sécession, menée par Stieglitz, avec des photos de l’Autrichien Heinrich Kühn ou de l’américain Alvin Langdon Coburn.
Les photographes français du mouvement pictorialiste n’ont pas ignoré le motif portuaire, pour preuve, les images de Charles Lhermitte montrant La Rochelle ou Lorient, celles de Robert Demachy et Constant Puyo, chefs de file du pictorialisme français.
Le port pictorialiste au seuil des années 1920 laisse place à un laboratoire de la vision avant-gardiste : à partir de plongées et de contre plongées, de désaxements et de perspectives. Cet « expressionnisme » de la vision cherche dans les architectures vertigineuses du modernisme une occasion d’en traduire les effets sur le promeneur contemporain et d’en saisir toute l’originalité. Les élèves et professeurs du Bauhaus comme Florence Henri et le célèbre Lazlo Moholy Nagy, l’Américaine moderniste Germaine Krull ou son compatriote surréaliste Man Ray, sans oublier François Kollar ou Emeric Feher, tous ont fait le « voyage du transbordeur » pour exercer leur nouvelle vision.
Alors qu’au XIXe siècle le port est photographié dans le cadre d’une photographie d’usage, le port des années 1930 avec ses images « constructivistes » n’est plus photographié dans un but utilitaire. Le port devient alors motif et terrain de jeux pour les expérimentations.
Une collaboration de deux musées majeurs
Fortes d’une identité commune, les deux cités portuaires, Le Havre et Bordeaux, toutes deux classées Patrimoine mondial de l’Humanité se sont associées pour organiser cette exposition.
Puis deux fonds importants entrent respectivement en 1936 et 2004 et proviennent des collections privées de deux grands négociants havrais : Charles-Auguste Marande et Olivier Senn.
La représentation du port
Longtemps idéalisée, inscrite dans une tradition classique héritée de Claude Lorrain, la représentation du port évolue peu du XVIIe au XVIIIe siècle. Le développement économique au XIXe siècle s’accompagne un peu partout en France, et en Europe, de profondes mutations du monde portuaire et du lancement de grands chantiers de modernisation, à mesure que disparaît la marine à voile.
La vision des artistes change alors. Le port cesse d’être ce lieu métaphorique du voyage pour devenir un monde vivant, débordant d’activité, un lieu d’échanges plein d’odeurs et de mouvements, un territoire bruyant et sonore qui commence à affirmer son autonomie.
Les artistes sensibles à la vie moderne ne pouvaient manquer de trouver là le parfait reflet de leur époque bouleversée par l’industrialisation. Leurs regards se portent désormais sur un nouveau paysage scandé par les silhouettes métalliques des ponts transbordeurs, des grues à vapeur. Ils embrassent dans leurs compositions les étendues dilatées des quais où se multiplient les entrepôts. Certains, plus attentifs à l’homme, décrivent sans complaisance le labeur harassant des débardeurs évoluant entre les cordages, les passerelles, les bites d’amarrage, les rails de chemin de fer et les ballots de marchandises.
Les transformations de la représentation de cet univers
L’exposition souligne les transformations de la représentation de cet univers, depuis les années 1850 jusqu’à la veille de la deuxième guerre mondiale, dans la peinture, la photographie, la sculpture et le dessin. Les années 1870 – 1920 font l’objet d’un examen plus approfondi avec les figures de Baldus, Boudin, Jongkind, Monet, Pissarro. Les incursions des pointillistes dans ce domaine seront abordées notamment à travers l’œuvre de Maximilien Luce, mais surtout la figure de Signac qui entreprend à la fin de sa vie une ambitieuse série d’aquarelles, « Les Ports de France », pour le collectionneur Gaston Lévy.
Albert Marquet, natif de Bordeaux et dont le musée de cette ville conserve l’un des plus importants fonds, est par excellence le grand peintre de ports du XXe siècle. Un ensemble conséquent de toiles évoquera la diversité des sites que l’artiste a parcouru tout au long de sa vie, de Marseille à Stockholm.
Une attention particulière sera portée aux artistes du Nord de l’Europe qui, sous l’influence du réalisme et du naturalisme, interrogent, avec une rudesse dont se ressent leur production, le monde bigarré des quais hollandais ou belges. La sélection confrontera les figures puissantes des dockers sculptées par Constantin Meunier aux visions sombres et mélancoliques de Van Mieghem ou abréviatives de Spilliaert.
L’appropriation décisive des nouveaux territoires portuaires structurés par de grandes lignes de force qui géométrisent le paysage a lieu avec l’avènement du cubisme. Des artistes comme André Lhote n’ont pas manqué de trouver là le prétexte à de nouvelles explorations plastiques.
La photographie et le « paysage portuaire », entre pittoresque et modernisme
La photographie des ports, nous invite à comprendre comment le port forme un motif aussi intéressant que l’est alors un paysage de bord de mer traditionnel. Elle traduit fort bien la « photogénie » des ports qui ne se démentira pas durant de nombreuses décennies.
Témoin et instrument de l’aménagement des zones portuaires, l’image photographique est aussi l’outil d’un imaginaire de ces lieux. Au même titre que la peinture ou la littérature, la photographie produit et diffuse les formes culturelles du port, un tissu de motifs qui dessinent peu à peu un imaginaire spécifique. Parmi eux, les bateaux deviennent un sujet de choix et le port devient ainsi un véritable petit théâtre de la mobilité tranquille dont découle toute une iconographie qui forme un véritable laboratoire de l’image du mouvement.
Le port contient ce « quotient » de modernité que lui confère sa double fonction traduite par le photographe, un port fonctionnel et pittoresque, à la fois lieu de travail et lieu de rêverie par l’idée même de voyage qu’il implique. Les nombreuses vues de construction de navires et d’ouvrages cultivent, par la monumentalisation des travaux, la célébration du progrès. Dans la grande tradition des vues de chantier, les photographes demandent aux ouvriers et à leurs contremaîtres de prendre la pose.
Une vision esthétique se dégage peu à peu de l’image des ports. Elle associe les vertus documentaires de la description des installations industrielles et le pittoresque de la vie des quais. Aux XIXe et XXe siècles, apparaît le « pictorialisme », le goût pour des images saturées par l’atmosphère remplace la clarté des documents techniques. On peut l’observer à travers l’album consacré au port de Hambourg (1908) avec des photographies de Schmidt et Kofahl ou bien dans la revue Camera Work, organe de la Photo-Sécession, menée par Stieglitz, avec des photos de l’Autrichien Heinrich Kühn ou de l’américain Alvin Langdon Coburn.
Les photographes français du mouvement pictorialiste n’ont pas ignoré le motif portuaire, pour preuve, les images de Charles Lhermitte montrant La Rochelle ou Lorient, celles de Robert Demachy et Constant Puyo, chefs de file du pictorialisme français.
Le port pictorialiste au seuil des années 1920 laisse place à un laboratoire de la vision avant-gardiste : à partir de plongées et de contre plongées, de désaxements et de perspectives. Cet « expressionnisme » de la vision cherche dans les architectures vertigineuses du modernisme une occasion d’en traduire les effets sur le promeneur contemporain et d’en saisir toute l’originalité. Les élèves et professeurs du Bauhaus comme Florence Henri et le célèbre Lazlo Moholy Nagy, l’Américaine moderniste Germaine Krull ou son compatriote surréaliste Man Ray, sans oublier François Kollar ou Emeric Feher, tous ont fait le « voyage du transbordeur » pour exercer leur nouvelle vision.
Alors qu’au XIXe siècle le port est photographié dans le cadre d’une photographie d’usage, le port des années 1930 avec ses images « constructivistes » n’est plus photographié dans un but utilitaire. Le port devient alors motif et terrain de jeux pour les expérimentations.
Une collaboration de deux musées majeurs
Fortes d’une identité commune, les deux cités portuaires, Le Havre et Bordeaux, toutes deux classées Patrimoine mondial de l’Humanité se sont associées pour organiser cette exposition.
Renseignements pratiques
Musée Malraux
2, boulevard Clemenceau - 76600 Le Havre
Tel. : 02.35.19.62.62 / Fax : 02.35.19.93.01
Courriel : museemalraux@ville-lehavre.fr
Site : musee-malraux.ville-lehavre.fr
Tarifs : Plein tarif : 5 €uros, Tarif réduit : 3 €uros
Itinérance de l’exposition : Bordeaux, Musée des Beaux-arts du 26 février au 14 juin 2009
Publication : catalogue édité par les éditions Somogy
256 pages, 220 illustrations couleurs. Prix : 30 €uros. ISBN : 978-2-7572-0213-5
Sous la direction de Annette Haudiquet, conservateur en chef du musée Malraux, Olivier Le Bihan, directeur du musée des Beaux-Arts de Bordeaux et Jean-Pierre Mélot, conservateur au musée Malraux.
Auteurs : John Barzman, professeur d’histoire contemporaine à l’Université du Havre, Marina Ferretti Bocquillon, historienne de l’art, commissaire indépendante d’expositions, Françoise Garcia, conservateur au musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Vincent Guigueno, professeur d’histoire à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, Annette Haudiquet, conservateur en chef du musée Malraux, Olivier Le Bihan, directeur du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Géraldine Lefebvre, attachée de conservation au musée Malraux, Laurent Manœuvre, conservateur à la Direction des Musées de France, Bruno Marnot, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Bordeaux 3, Aude Mathé, responsable de la cinémathèque de la Cité de l’Architecture, Paris, Caroline Mathieu, conservateur en chef au musée d’Orsay, Jean-Pierre Mélot, conservateur au musée Malraux, Michel Poivert, professeur de l’histoire de la Photographie à l’université de Paris I, président de la Société Française de la Photographie
2, boulevard Clemenceau - 76600 Le Havre
Tel. : 02.35.19.62.62 / Fax : 02.35.19.93.01
Courriel : museemalraux@ville-lehavre.fr
Site : musee-malraux.ville-lehavre.fr
Tarifs : Plein tarif : 5 €uros, Tarif réduit : 3 €uros
Itinérance de l’exposition : Bordeaux, Musée des Beaux-arts du 26 février au 14 juin 2009
Publication : catalogue édité par les éditions Somogy
256 pages, 220 illustrations couleurs. Prix : 30 €uros. ISBN : 978-2-7572-0213-5
Sous la direction de Annette Haudiquet, conservateur en chef du musée Malraux, Olivier Le Bihan, directeur du musée des Beaux-Arts de Bordeaux et Jean-Pierre Mélot, conservateur au musée Malraux.
Auteurs : John Barzman, professeur d’histoire contemporaine à l’Université du Havre, Marina Ferretti Bocquillon, historienne de l’art, commissaire indépendante d’expositions, Françoise Garcia, conservateur au musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Vincent Guigueno, professeur d’histoire à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, Annette Haudiquet, conservateur en chef du musée Malraux, Olivier Le Bihan, directeur du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Géraldine Lefebvre, attachée de conservation au musée Malraux, Laurent Manœuvre, conservateur à la Direction des Musées de France, Bruno Marnot, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Bordeaux 3, Aude Mathé, responsable de la cinémathèque de la Cité de l’Architecture, Paris, Caroline Mathieu, conservateur en chef au musée d’Orsay, Jean-Pierre Mélot, conservateur au musée Malraux, Michel Poivert, professeur de l’histoire de la Photographie à l’université de Paris I, président de la Société Française de la Photographie