L’homme a-t-il oublié d’être un homme ? Par l’adaptation subtile et la sublime interprétation de l’œuvre de Kafka, les Jorodowsky père et fils questionnent l’homme. Dans la période actuelle, période charnière, folle et tourmentée, l’homme sociétal hésite, patauge, titube, oublie d’être ‘humain’. Humain ? Humaines les bombes pleuvant sur des hôpitaux ? Humain le spectacle de centaines de ‘radeaux de la Méduse’ que l’on contemple de loin ? Humain l’enfant que l’on raccompagne à la frontière, le clochard mort de froid, la petite vieille attachée sur son lit au fond d’un couloir d’hôpital ? Et si les animaux refaisaient surgir en nous une « humanité » ?
C’est l’histoire d’un gorille qui a si bien appris à devenir homme, parler comme un homme, penser comme un homme, marcher –pas tout-à-fait- comme un homme, qu’il en a oublié la liberté. Mais elle est là, enfouie dans sa mémoire. Peu à peu, la nostalgie l’envahit et cette nostalgie se propage à l’assistance. Qu’est-il devenu, « que sommes-nous devenus » ? Par le truchement de mots simples que la bête devenu homme nous adresse, Alejandro et Brontis Jorodowsky nous plaquent littéralement face à nos perversités. L’homme est perverti. Ni homme, ni bête, mais des êtres vivants à la dérive. Le chien attaché à sa chaîne ou attaché à son maître est-il plus heureux pour cela ? Est-ce cela notre conception de la liberté ? De la même façon que ce gorille sauve un peu de sa bestialité en se remémorant sa jungle natale, l’homme d’aujourd’hui devrait se souvenir de l’humanité en lui. Y réussira-t-il ?
Pas d’exagération simiesque, de l’humour, de la sobriété, une mise en scène brillante et une performance d’acteur magistrale pour une gifle monumentale donnée à l’homme par la bête.
Danielle Dufour-Verna
C’est l’histoire d’un gorille qui a si bien appris à devenir homme, parler comme un homme, penser comme un homme, marcher –pas tout-à-fait- comme un homme, qu’il en a oublié la liberté. Mais elle est là, enfouie dans sa mémoire. Peu à peu, la nostalgie l’envahit et cette nostalgie se propage à l’assistance. Qu’est-il devenu, « que sommes-nous devenus » ? Par le truchement de mots simples que la bête devenu homme nous adresse, Alejandro et Brontis Jorodowsky nous plaquent littéralement face à nos perversités. L’homme est perverti. Ni homme, ni bête, mais des êtres vivants à la dérive. Le chien attaché à sa chaîne ou attaché à son maître est-il plus heureux pour cela ? Est-ce cela notre conception de la liberté ? De la même façon que ce gorille sauve un peu de sa bestialité en se remémorant sa jungle natale, l’homme d’aujourd’hui devrait se souvenir de l’humanité en lui. Y réussira-t-il ?
Pas d’exagération simiesque, de l’humour, de la sobriété, une mise en scène brillante et une performance d’acteur magistrale pour une gifle monumentale donnée à l’homme par la bête.
Danielle Dufour-Verna