Exposition originale s’il en est car ses photographies, splendides, ont été ornées de poésie. En effet, la comédienne Prune Lichtlé a lu des œuvres de Marjolaine Heeg. Un moment comme un souffle, d’une pureté absolue.
A admirer ses photographies, à la fois délicates, éclatantes, surprenantes dans le détail, on devine l’artiste sensible qui met en exergue un hymne à la beauté, plus encore, un hymne à la vie.
A admirer ses photographies, à la fois délicates, éclatantes, surprenantes dans le détail, on devine l’artiste sensible qui met en exergue un hymne à la beauté, plus encore, un hymne à la vie.
Dans l’anxiété
De l’adieu
Tendu sur la brume
Les hirondelles se levèrent
Et j’ai trébuché
Sur tes lèvres soudées
Rivets fermés
Sur le matin
Marjolaine Heeg photographie avec son âme, une âme qu’elle livre tout entière dans un écrin Des racines et des vies paru aux éditions L’arbre à Lunes, un livre comme un cri, mais il est tendre. Là, se mêlent des photographies d’arbres en noir et blanc à des poésies, courtes, palpitantes, vibrantes. Les branches, les ramures, les racines s’enchevêtrent aux mots, les portent, les supportent, les caressent ou les enfouissent. Tout se noue autour de l’arbre et de la sève d’un pourquoi. Par-delà d’évidentes blessures qu’elle panse avec les mots et la force de l’arbre, c’est un message d’amour qu’elle lance à l’univers et aux lecteurs/spectateurs que nous sommes. Là aussi, plus qu’une déchirure, c’est toujours un hymne à la vie.
Des branches qui se tordent, se ramifient, se tendent, s’accrochent aux mots, cordon ombilical entre terre et ciel… Si l’univers de Marjolaine Heeg est onirique, il relie délicatement, comme en filigrane, l’inéluctable à l’espoir.
Jean-Pierre Cramoisan, écrivain, a préfacé le livre de l’artiste. Nous ne pouvions nous priver de son texte que je retranscris in extenso ci-après. C’est donc un article que nous signerons à deux.
« C’est en reliant l’image au verbe que la poésie de Marjolaine prend tout son sens. Qu’elle s’élève, lumineuse, fragile, intacte dans l’émotion et le pouvoir de dire. Mais écrire en poète n’est jamais chose gagnée. On n’atteint jamais qu’un fantôme de vérité. Ce que nous vivons est souvent le passage d’un temps d’illusion. La réalité nous manipule et ne s’aperçoit même pas que nous nous servons d’elle pour exister.
Marjolaine qui connaît si bien l’âpreté des combats intérieurs nous confie « la mort dans l’âme » tu as gagné… je suis vaincue…
Si les mots qu’elle rassemble aujourd’hui dans ce recueil de poèmes s’associent à des photographies de grands arbres pour qualifier un ancien jardin laissé en friche, c’est qu’ils ouvrent sur d’indispensables chemins buissonniers. Ils en sont le fil magique pour retrouver, à travers la lucidité des mots proches qui préparent à l’offrande de la vie, l’empreinte d’un cœur blessé : l’absence de l’autre.
Deux étoiles éteintes perdues, égarées, à la recherche d’une clé pour ouvrir les verrous des regrets de ce qui ne peut pas être. La sonorité des rythmes se raccordent aux égarements et aux errances de l’âme dont le flux s’écoule dans les replis secrets du malheur pour adoucir la perte des jours en allés, l’espérance désenchantée de ne jamais connaître la formule qui prélude à toute vérité.
Il y a toujours un jardin derrière le mur, nous confie Marjolaine, où il pleut doucement, où la vie tremble parfois.
Les arbres, ces sombres funambules, l’accompagnent à travers l’esprit de la nature, debout, solides, irriguant le ciel, sculptant l’espace, disparaissant dans la terre ; et rien ne peut éteindre leur appétit d’azur, ni l’immense soif de leurs racines.
Comme une ressouvenance des parfums de cachette de l’immensité.
Ces géants tranquilles, puissants, désordonnés dans la folle, démesure de leurs ramures, déploient une force stable qui résiste à l’épreuve du temps ; ils sont éclaireurs et sorciers qui nous rappellent l’immuable secret qui nous fait entrevoir l’architecture d’une toile d’horizon où tout se fait. Le lieu où s’élabore et se construit la parole poétique devient envol de tous les possibles. En effeuillant la mélancolie de ses vers, mais aussi de ses aspirations les plus feutrées, les plus intimes, Marjolaine traduit la rumeur de ses tourments, ce qu’elle croit, ce qu’elle ressent, ce qu’elle perçoit des images et des mirages qui l’entourent ; elle sait aussi que tout est fragile, voué à l’usure, à l’effacement, et que rien jamais ne nous est acquis.
Comme la structure des arbres fait écho à la terre et au ciel, car ce qui est en bas demeure et ressemble à ce qui est en haut, Marjolaine plonge ses racines dans la vie et ses petits mystères ; elle se laisse revitaliser par cette sève qui la nourrit, l’irrigue et l’achemine en dedans d’elle-même.
Chaque trace du passé qui la traverse et ravive les multiples nuances de sa sensibilité est un appel à conjurer l’absence d’un visage, d’un regard, d’un endroit, d’un instant, où le souvenir et le rêve se lient, se nouent, ne demandant qu’à sourdre et à se mêler dans la confluence du monde.
Là-haut, dans le miroir du ciel qui reflète les hautes silhouettes des arbres, à la verticale de la lumière, quelque chose invite le poète à partager les fragments fugaces de l’indicible. Ainsi la distance d’une racine est égale à l’extrémité d’une branche, d’une dernière feuille ; ainsi un mot porte en lui la présence sacrée de ce qui ne se voit pas, mais qui est là de toute éternité.
Dans la tourmente du monde des images apparaissent portées par l’incandescence du verbe, des couleurs se déploient dans la nuit ; des frôlements de corps, où les mains ouvrent au voyage, dessinent les caresses d’une volupté discrète qui toujours fleurit.
On sent dans cette poésie une envie de voir trop longtemps engourdie, des désirs contenus, trop vite tus, une étoile solitaire accrochée au faîte d’un arbre, et qui attend.
Il en a fallu du temps à ces colosses pour tirer sur leurs branches, verticaliser leur fût et parvenir à frôler cette lumière venue d’ailleurs.
La poésie de Marjolaine nous fait retrouver la suavité des mots rétifs.
Libre et sans regret, elle semble n’appartenir qu’à l’instant qui se nourrit de cette vie qui se régénère.
Jean-Pierre Cramoisan/Danielle Dufour Verna
De l’adieu
Tendu sur la brume
Les hirondelles se levèrent
Et j’ai trébuché
Sur tes lèvres soudées
Rivets fermés
Sur le matin
Marjolaine Heeg photographie avec son âme, une âme qu’elle livre tout entière dans un écrin Des racines et des vies paru aux éditions L’arbre à Lunes, un livre comme un cri, mais il est tendre. Là, se mêlent des photographies d’arbres en noir et blanc à des poésies, courtes, palpitantes, vibrantes. Les branches, les ramures, les racines s’enchevêtrent aux mots, les portent, les supportent, les caressent ou les enfouissent. Tout se noue autour de l’arbre et de la sève d’un pourquoi. Par-delà d’évidentes blessures qu’elle panse avec les mots et la force de l’arbre, c’est un message d’amour qu’elle lance à l’univers et aux lecteurs/spectateurs que nous sommes. Là aussi, plus qu’une déchirure, c’est toujours un hymne à la vie.
Des branches qui se tordent, se ramifient, se tendent, s’accrochent aux mots, cordon ombilical entre terre et ciel… Si l’univers de Marjolaine Heeg est onirique, il relie délicatement, comme en filigrane, l’inéluctable à l’espoir.
Jean-Pierre Cramoisan, écrivain, a préfacé le livre de l’artiste. Nous ne pouvions nous priver de son texte que je retranscris in extenso ci-après. C’est donc un article que nous signerons à deux.
« C’est en reliant l’image au verbe que la poésie de Marjolaine prend tout son sens. Qu’elle s’élève, lumineuse, fragile, intacte dans l’émotion et le pouvoir de dire. Mais écrire en poète n’est jamais chose gagnée. On n’atteint jamais qu’un fantôme de vérité. Ce que nous vivons est souvent le passage d’un temps d’illusion. La réalité nous manipule et ne s’aperçoit même pas que nous nous servons d’elle pour exister.
Marjolaine qui connaît si bien l’âpreté des combats intérieurs nous confie « la mort dans l’âme » tu as gagné… je suis vaincue…
Si les mots qu’elle rassemble aujourd’hui dans ce recueil de poèmes s’associent à des photographies de grands arbres pour qualifier un ancien jardin laissé en friche, c’est qu’ils ouvrent sur d’indispensables chemins buissonniers. Ils en sont le fil magique pour retrouver, à travers la lucidité des mots proches qui préparent à l’offrande de la vie, l’empreinte d’un cœur blessé : l’absence de l’autre.
Deux étoiles éteintes perdues, égarées, à la recherche d’une clé pour ouvrir les verrous des regrets de ce qui ne peut pas être. La sonorité des rythmes se raccordent aux égarements et aux errances de l’âme dont le flux s’écoule dans les replis secrets du malheur pour adoucir la perte des jours en allés, l’espérance désenchantée de ne jamais connaître la formule qui prélude à toute vérité.
Il y a toujours un jardin derrière le mur, nous confie Marjolaine, où il pleut doucement, où la vie tremble parfois.
Les arbres, ces sombres funambules, l’accompagnent à travers l’esprit de la nature, debout, solides, irriguant le ciel, sculptant l’espace, disparaissant dans la terre ; et rien ne peut éteindre leur appétit d’azur, ni l’immense soif de leurs racines.
Comme une ressouvenance des parfums de cachette de l’immensité.
Ces géants tranquilles, puissants, désordonnés dans la folle, démesure de leurs ramures, déploient une force stable qui résiste à l’épreuve du temps ; ils sont éclaireurs et sorciers qui nous rappellent l’immuable secret qui nous fait entrevoir l’architecture d’une toile d’horizon où tout se fait. Le lieu où s’élabore et se construit la parole poétique devient envol de tous les possibles. En effeuillant la mélancolie de ses vers, mais aussi de ses aspirations les plus feutrées, les plus intimes, Marjolaine traduit la rumeur de ses tourments, ce qu’elle croit, ce qu’elle ressent, ce qu’elle perçoit des images et des mirages qui l’entourent ; elle sait aussi que tout est fragile, voué à l’usure, à l’effacement, et que rien jamais ne nous est acquis.
Comme la structure des arbres fait écho à la terre et au ciel, car ce qui est en bas demeure et ressemble à ce qui est en haut, Marjolaine plonge ses racines dans la vie et ses petits mystères ; elle se laisse revitaliser par cette sève qui la nourrit, l’irrigue et l’achemine en dedans d’elle-même.
Chaque trace du passé qui la traverse et ravive les multiples nuances de sa sensibilité est un appel à conjurer l’absence d’un visage, d’un regard, d’un endroit, d’un instant, où le souvenir et le rêve se lient, se nouent, ne demandant qu’à sourdre et à se mêler dans la confluence du monde.
Là-haut, dans le miroir du ciel qui reflète les hautes silhouettes des arbres, à la verticale de la lumière, quelque chose invite le poète à partager les fragments fugaces de l’indicible. Ainsi la distance d’une racine est égale à l’extrémité d’une branche, d’une dernière feuille ; ainsi un mot porte en lui la présence sacrée de ce qui ne se voit pas, mais qui est là de toute éternité.
Dans la tourmente du monde des images apparaissent portées par l’incandescence du verbe, des couleurs se déploient dans la nuit ; des frôlements de corps, où les mains ouvrent au voyage, dessinent les caresses d’une volupté discrète qui toujours fleurit.
On sent dans cette poésie une envie de voir trop longtemps engourdie, des désirs contenus, trop vite tus, une étoile solitaire accrochée au faîte d’un arbre, et qui attend.
Il en a fallu du temps à ces colosses pour tirer sur leurs branches, verticaliser leur fût et parvenir à frôler cette lumière venue d’ailleurs.
La poésie de Marjolaine nous fait retrouver la suavité des mots rétifs.
Libre et sans regret, elle semble n’appartenir qu’à l’instant qui se nourrit de cette vie qui se régénère.
Jean-Pierre Cramoisan/Danielle Dufour Verna
Marjolaine Heeg. L'enfant derrière la porte