Opéra de Toulon : "Un Château de Cartes" de Hadrien Raccah au Théâtre Liberté le 17 avril à 20h00

Distribution :
Auteur : Hadrien Raccah
Mise en scène : Serge Postigo
Adam : Gérard Darmon
Vincent : Serge Postigo
Caroline : Isabelle Gélinas

Un dîner qui dérape et un retour inattendu
Alors que la soirée touchait à sa fin après un dîner en apparence paisible entre Adam et Caroline et leur ami Vincent, accompagné de son amie, les tensions latentes se manifestent par une soudaine crise de jalousie entre Adam et Caroline. Un événement inattendu vient perturber davantage cette soirée déjà électrique : le retour inopiné de Vincent, évoquant une panne de voiture. Son retour agit comme un catalyseur, forçant Adam et Caroline à confronter les fissures de leur relation à travers un jeu de rôles inattendu et de quiproquos surréalistes.

Une inversion des rôles
Le retour de Vincent bouleverse la dynamique initiale, le plaçant au centre d'un triangle explosif où la tension culmine. Vincent se retrouve à dîner avec Caroline chez Adam, et sa présence exacerbe les non-dits et les tentatives maladroites du couple pour masquer leurs problèmes. Témoin involontaire, il devient un élément clé qui révèle les difficultés conjugales sous-jacentes.

La balle jaune : test de réalité face au deuil
La récurrente "balle jaune", d'abord perçue comme un détail anodin tout au long de la pièce, acquiert une signification capitale au dénouement poignant d'"Un Château de Cartes". C'est lorsque Adam se retrouve dans une clinique que cet objet se transforme en un test de réalité tangible. Confronté à la vérité poignante du décès de Caroline et à l'illusion de sa présence persistante, la balle jaune devient, sous la manipulation du médecin, un outil crucial pour tenter de distinguer le réel de la chimère qui hante l'esprit d'Adam. Ainsi, la "balle jaune" symbolise la tentative désespérée de l'esprit de s'accrocher à un objet tangible face à l'insaisissable absence. Ce test médical, impliquant cette balle familière, cristallise la lutte intérieure d'Adam et sert de catalyseur à sa douloureuse prise de conscience finale, conférant à la comédie une profondeur émotionnelle inattendue.

Un trio d'acteurs au cœur du tourbillon émotionnel
Le succès de la pièce repose sur la performance exceptionnelle des acteurs.
Gérard Darmon incarne Adam avec une intensité captivante, naviguant avec aisance entre tension comique et vulnérabilité poignante, exprimant avec force le déni et le désespoir.
Isabelle Gélinas interprète Caroline avec une subtilité remarquable, esquissant les fissures du couple avant de distiller avec délicatesse le souvenir aimant et l'évanescence de l'illusion, formant un duo d'une justesse émotionnelle bouleversante avec Darmon.
Serge Postigo, en plus de sa mise en scène dynamique, campe un Vincent d'une justesse et d'un naturel désarmants, apportant une légèreté initiale qui contraste avec le drame sous-jacent.
Ensemble, ils forment un trio d'une alchimie exceptionnelle, emportant le public dans un véritable tourbillon d'émotions.

"Un Château de Cartes" nous a offert une expérience théâtrale forte, portée par des acteurs talentueux et une mise en scène inventive. La qualité de l'écriture, la subtilité des dialogues et le mélange réussi d'humour et d'émotion vive touchent profondément, mettant en lumière la fragilité des liens humains et la puissance de l'esprit face au deuil, au sein d'interactions où l'amitié n'est pas toujours sincère. Cette pièce n'est pas seulement une œuvre de théâtre, mais une exploration poignante de la manière dont l'esprit se débat face à la perte, et une réflexion sur la complexité des relations humaines, où les apparences sont souvent trompeuses.
Leila Metina-Bouchour
Leila.metina@gmail.com